
Un groupe de parlementaires démocrates a introduit un projet de loi visant à interdire les opérations des services d'immigration américains dans les églises, les écoles et d'autres "lieux sensibles". Une initiative à contre-courant de la politique d'expulsions massives menée par l'administration Trump.
Les parlementaires démocrates Jesús García (Illinois) et Adriano Espaillat (New York), ainsi que le sénateur Richard Blumenthal (Connecticut), ont déposé un texte baptisé Protecting Sensitive Locations Act qui vise à limiter les interventions des agents de l'Immigration and Customs Enforcement (ICE) et de la police des frontières (CBP) dans un rayon de 300 mètres autour des "lieux sensibles" tels que les établissements scolaires, les arrêts de bus scolaires, les hôpitaux et les lieux de culte, sauf en cas de "circonstances impérieuses" impliquant des menaces graves pour la sécurité publique.
En janvier, suite à l'élection de Donald Trump, le ministère de la Sécurité intérieure a annulé une directive de la précédente administration démocrate qui encadrait l'action des agents de l'ICE et de la police des frontières autour de ces zones.
"Les agents de l'ICE doivent avoir le pouvoir de décider que, si une menace pour la sécurité nationale ou la sûreté publique existe dans un de ces lieux, ils ont la possibilité d'effectuer une arrestation", a plaidé sur ABC Tom Homan, soulignant notamment que "beaucoup" de membres du gang criminel salvadorien MS-13, qui sévit notamment aux États-Unis, étaient en âge d'aller à l'école. Il a notamment invoqué la nécessité du caractère dissuasif de la répression de l'immigration clandestine.
Une protection "indispensable" pour les familles immigrées
Les défenseurs du Protecting Sensitive Locations Act estiment que cette mesure est indispensable pour assurer la sécurité des familles immigrées et leur permettre d'accéder à des services fondamentaux sans crainte d'arrestation. "Personne ne devrait vivre dans la peur d'être détenu en emmenant son enfant à l'école, en se rendant chez le médecin ou en pratiquant sa foi", a déclaré le représentant García. Il estime que la politique d'immigration de l'administration Trump créé un climat de terreur injustifié dans de nombreuses communautés.
Selon le Christian Post, le texte a reçu le soutien de près de 600 organisations religieuses et de défense des droits civiques, dont l'Église Méthodiste Unie, le United Church of Christ et l'Alliance des Baptistes. "Les églises et les écoles doivent rester des espaces de refuge et de confiance, pas des terrains de chasse pour les forces de l'ordre", affirme une porte-parole de la Franciscan Action Network.
Un projet de loi menacé par l'opposition républicaine
Malgré ce soutien, le texte risque de se heurter à une forte opposition. Aucun parlementaire républicain ne s'est joint aux démocrates pour porter cette loi, et avec les deux chambres du Congrès actuellement contrôlées par le Parti républicain, son adoption semble incertaine.
La politique migratoire est devenue un sujet hautement polarisant. Pour les détracteurs de cette initiative, empêcher les forces de l'ordre d'intervenir dans ces zones revient à offrir une immunité de fait à des individus en situation irrégulière. "Les criminels ne doivent pas pouvoir se cacher dans les églises et les écoles pour éviter d'être arrêtés", a réagi un porte-parole du ministère de la Sécurité intérieure.
Certains républicains pointent également du doigt un recours "abusif" à la protection humanitaire sous l'administration Biden, affirmant que cette politique a permis l'entrée de 1,5 million de migrants de manière trop permissive. "Nous devons restaurer le respect des lois et assurer la sécurité de nos citoyens avant tout", a déclaré un représentant républicain lors d'un débat sur le sujet.
Une "atteinte à la liberté religieuse"
En réaction à la suppression de cette politique de protection des "lieux sensibles", plusieurs organisations religieuses ont déposé une plainte contre le Département de la Sécurité intérieure des États-Unis (DHS ), l'ICE et le CBP, estimant que ces nouvelles pratiques portaient atteinte à la liberté religieuse. "Mener une opération policière pendant un office religieux ou une activité ministérielle viole le caractère sacralisé du lieu et brise la confiance entre la communauté et son pasteur", argumente la plainte.
Camille Westphal Perrier