Ma Huichao, une chrétienne de la province du Xinjiang, ne peut se défendre en justice, ce droit ne lui a pas été reconnu. Il s’agit là de l’un des derniers avatars d’une politique de répression du droit à la défense qui a récemment vu l’arrestation de plusieurs avocats spécialisés dans les droits de l’homme. La Chine, qui a signé le Pacte international relatif aux droits civils et politiques en 1967, n’a jamais ratifié le texte, de sorte qu’elle n’est pas tenue par lui.
Le procès de Ma Huichao a débuté à la mi-novembre, elle est accusée d’avoir « rassemblé une foule en vue de perturber l’ordre public ». Cette qualification des faits habille une simple rencontre religieuse chez elle, avec quatre autres chrétiens. Les autorités ont choisi de ne maintenir en détention que l’hôtesse du service cultuel et de relâcher ses quatre compagnons. L’arrestation a eu lieu en raison de l’interdiction de célébrer des rencontres religieuses non enregistrées et donc non contrôlables par les autorités publiques. Depuis début octobre, la liberté de culte est encore davantage restreinte en Chine, un texte adopté par le Conseil des affaires de l’État dispose que les activités religieuses non homologuées sont interdites, ce qui était déjà le cas en pratique, et surtout de disperser les chrétiens pour qu’ils ne répondent pas à l’exigence du besoin officiel de regroupement communautaire pour le culte. Seules les églises officielles, étroitement contrôlées et relais de la parole du Parti communiste, sont autorisées. Le 11 novembre, la police avait ainsi désuni physiquement des chrétiens qui s’étaient rencontrés pour une cérémonie religieuse et détenu administrativement trois des fidèles avec la même accusation que celle prononcée à l’encontre de Ma Huichao, ainsi que pour « diffusion d’une religion illégale ».
Durant le procès, actuellement suspendu, les autorités ont interdit à l’avocat de Ma Huichao de plaider l’innocence pour sa cliente. Le juriste n’ignore pas quels sont les dangers d’insister dans la défense, notamment après la disparition de trois militants des droits de l’homme le mois dernier. Les avocats en vue qui défendent les libertés sont eux-mêmes tracassés par la justice, par exemple Me Pu Zhiqiang condamné à trois ans de prison avec sursis après 19 mois de détention, ou encore de Me Zhang Kai, célèbre avocat chrétien qui défend les églises dont les croix sont abattues. Les avocats des chrétiens ne sont pas mieux traités que ceux du mouvement falun gong - dont le sort s’améliore - qui peuvent être menacés ou empêchés d’entrer dans les tribunaux. De fait, alors que le droit chinois parle de juste procès, les autorités font pression sur les juristes pour qu’ils n’exercent pas leur métier.
Si la Constitution chinoise déclare que « l’accusé a droit à la défense », en son article 125, Ma Huichao et son représentant se heurtent à une justice dont le processus n’est pas impartial et qui refuse d’entendre la cause de la première intéressée. Le droit au silence est transformé en devoir de silence au mépris de toute idée de droit au procès équitable. Loin de l’idée populaire du juge Bao du XIe siècle, quasiment vénéré dans le pays pour son sens de la justice.
Hans-Søren Dag