Un juge fédéral blâme l’Administration Obama pour le refus d’accueillir des chrétiens syriens persécutés
Un juge fédéral a critiqué l’Administration Obama concernant le très faible nombre de réfugiés chrétiens syriens acceptés par les autorités, 56 pour 11 000 musulmans, rapporte le média conservateur américain Fox News. Le magistrat parle d’une « contradiction qui laisse perplexe ». Ses questions peuvent se lire en considérant les dernières révélations du lanceur d’alerte Wikileaks montrant que, dans l’Administration Obama, ont délibérément et illégalement été rejetés les chrétiens au profit de musulmans quand il s’est agi de répartir les postes à responsabilités entre des Américains d’origine arabe.
C‘est au cours d’une question tranchée le 21 octobre dernier que le juge Daniel Manion, de la Cour d’appel des États-Unis pour le septième circuit, s’est interrogé sur la discrimination subie par les candidats syriens de confession chrétienne quant à l’obtention d’un titre de réfugié. La Heartland Alliance’s National Immigrant Justice Center, une ONG militant pour les droits de l’homme qui défend les immigrants et les demandeurs d’asile, était à l’origine du procès, elle cherchait à obtenir des informations sur certains groupes terroristes.
L’association voulait connaître l’identité des organisations terroristes placées sur la liste Tier III qui, contrairement aux deux premières, est secrète. L’intérêt de l’absence de publicité quant à cet inventaire est de ne mettre en alerte les demandeurs d’asile liés à des groupes criminels non officiellement considérés, afin de mieux les repérer et leur refuser l’entrée sur le territoire américain. Mais, le juge Daniel Manion, magistrat semi-retraité, a saisi l’occasion pour critiquer l’Administration Obama qui manque totalement de transparence quant aux raisons pour lesquelles elle refuse les réfugiés chrétiens qui font leur demande en amont au Proche-Orient.
Pour l’année fiscale 2016, les États-Unis ont accueilli 11 491 réfugiés syriens dont seulement 56 chrétiens alors qu’ils représentent environ 10% de la population et le quart des Syriens ayant fui leur pays
Pour l’année fiscale 2016, allant du 1er octobre 2015 au 30 septembre dernier, les États-Unis ont accueilli 11 491 réfugiés syriens, quasiment tous officiellement musulmans sauf 56 chrétiens (voir notre article Quand l’Amérique d’Obama n’accueille quasiment pas de réfugiés chrétiens de Syrie). Déjà, depuis mars 2011 jusqu’à décembre 2015, Washington avait accordé un droit d’asile à seulement 53 chrétiens pour 2 000 musulmans, chrétiens dont certains font peut-être partie du contingent des 56. Avant la guerre, les chrétiens atteignaient environ 10% de la population, bien au-dessus des 0,48% sur l’ensemble des réfugiés acceptés cette dernière année fiscale par l’Administration Obama. Les chiffres sont d’autant plus surprenants que parmi les Syriens ayant quitté leur pays, environ un million ou 25% sont chrétiens.
Le troublant manque d’explication à une « contradiction qui laisse perplexe »
Si le juge Manion a souscrit à l’arrêt donnant raison aux autorités, il a émis une opinion concurrente au jugement, comme cela est possible dans les décisions de justice aux États-Unis pour aborder la question sous un autre angle. Développant son opinion en deux points, le magistrat aborde ainsi le second :
« J’écris séparément pour une seconde raison, critique, qui est ma préoccupation relative au manifeste déficit de chrétiens syriens parmi les immigrants de ce pays. Il est possible que notre affaire ait un lien direct avec cette énigme. »
Manion précise :
« Il est bien documenté que les réfugiés aux États-Unis ne sont pas représentatifs de cette région du monde en guerre. Probablement 10% de la population syrienne est chrétienne, et cependant moins d’un pourcent des réfugiés syriens admis aux États-Unis sont de cette confession. Reconnaissant cette crise en Syrie, le Président avait fixé l’objectif de réinstaller 10 000 réfugiés dans notre pays, et ce chiffre louable a été atteint en août. Toutefois, sur environ 11 000 réfugiés, seuls 56 sont chrétiens. Il n’y a ce jour aucune bonne explication à cette contradiction qui laisse perplexe. »
Le juge fédéral précise qu’il ne s’agit pas pour lui de dire que certaines communautés, en l’occurrence la musulmane, doivent être moins largement accueillies, car l’Amérique est disposée à recevoir des réfugiés du monde entier, mais que de bonnes données sont impératives dans une démocratie concernant le débat sur l’immigration. « Lorsque nous exigeons des preuves sévères quant aux États cherchant à protéger leurs citoyens, et qu’ensuite nous empêchons ces États d’obtenir ces preuves, nous créons un Catch-22 », précise-t-il - autrement dit, une situation kafkaïenne. Alors que l’Administration ouvre les portes aux réfugiés syriens, elle dissimule des informations les concernant au motif du secret impératif.
Si des miliciens chrétiens combattant les islamistes sont éventuellement refusés sur le sol américain, car ils seraient inscrits sur la liste Tier III, le delta reste trop important entre le nombre de chrétiens et de musulmans acceptés, d’autant que l’État islamique cible particulièrement les minorités non sunnites. Dans son opinion concurrente, le juge Manion fait référence à un article du Washington Times du 30 juin dernier intitulé « Les États-Unis accueillent un nombre record de réfugiés syriens en juin, en dépit des inquiétudes relatives au dépistage du terrorisme », un risque qui exaspère la moitié des gouverneurs des États fédérés, lesquels ont affirmé après l’attentat au Bataclan à Paris qu’ils n’accepteront les réfugiés syriens.
Discrimination dans l’accueil des réfugiés... et dans la composition du pouvoir
La discrimination religieuse en défaveur des chrétiens est un problème récurrent sous l’Administration Obama qui, si elle ne se préoccupe pas du sort des minorités chrétiennes persécutées, ou uniquement lorsqu’elle est poussée se prononcer, pratique également une sélection douteuse sur le territoire américain. L’ONG Wikileaks vient d’ailleurs de révéler des échanges de courriels entre deux hauts responsables de l’Administration qu’était en train de constituer Barack Obama peu avant sa première élection, des courriels en rapport avec la discrimination négative des chrétiens. Le 29 septembre 2008, Preeta Bansal, ancienne présidente de la Commission américaine sur la liberté religieuse internationale, et future conseillère au Bureau de la gestion et du budget, écrivait à John Podesta, futur conseiller spécial du Président Obama, et aujourd’hui directeur de campagne de Hillary Clinton, sur la manière de procéder retenue pour préparer la transition et l’avenir :
« Parmi les candidats pour des postes de direction, j’ai exclu ceux ayant des origines arabo-américaines, mais qui ne sont pas musulmans (par exemple George Mitchell - ndlr : cependant nommé plus tard « Envoyé spécial au Proche-Orient par Barack Obama). Plusieurs Américains d’origine libanaise par exemple sont chrétiens. Dans la dernière liste (des commissions externes), nombre de deux listés sont des musulmans américains, à l’exception d’une poignée (là où c’est indiqué) qui peuvent être Arabes américains, mais de religion indéterminée (spécialement les chrétiens). »
En mars dernier, pressé par les membres du Congrès, le secrétaire d’État John Kerry avait mentionné les chrétiens persécutés par l’État islamique. Un soutien en trompe-l’œil au vu de la réalité de l’accueil. A titre de comparaison, numériquement et proportionnellement, la Syrie a fait nettement mieux que les États-Unis dans la réception des chrétiens persécutés. A l’automne 2009, le régime dictatorial laïque de Bachar el-Assad avait, lui, accueilli 1,2 à 1,5 million de réfugiés irakiens, dont autour de 18,5% étaient chrétiens alors que cette communauté ne représentait alors que 2% de la population irakienne, mais était la plus menacée.
A partir de quand une discrimination équivaut-elle à de la persécution ? En ce qui concerne cette politique d’accueil, discriminer négativement des réfugiés demandeurs d’asile qui sont particulièrement ciblés en raison de leurs croyances mérite d’être considéré comme de la persécution par omission délibérée si les raisons tenues secrètes d’une telle sélection ne sont pas légitimes.
Hans-Søren Dag