"Ça me prend du temps de venir, mais je sais pourquoi je viens" : comme Guyrese, 20 ans, 3.000 personnes affluent le dimanche à la "Cité royale" de Croissy-Beaubourg, une méga-église évangélique aux allures de luxueux palais des congrès, en région parisienne.
Plus d'une heure avant le début de la célébration, les fidèles arrivent déjà à l'église d'Impact centre chrétien (ICC), la plus vaste église évangélique de France, inaugurée l'été dernier dans une banale zone périurbaine à environ 25 kilomètres à l'est de Paris.
C'est que le culte du pasteur Yvan Castanou attire les fidèles de toute l'Ile-de-France.
"C'est convivial, familial", même si "on se prend parfois de bons rappels à l'ordre !", lance en riant Elon, 20 ans. "C'est vivant, le leader nous pousse", affirme Lolita Mabeya, 41 ans, qui se dit "transformée par le message".
Les fidèles, majoritairement afro-caribéens, viennent pour beaucoup en famille - les enfants sont inscrits à des activités en arrivant. "Ils suivent un culte adapté à leur âge, on est tranquille, c'est très bien organisé", explique Anne Bertrand, 47 ans, avant de se diriger vers l'amphithéâtre de 3.600 places où la célébration va débuter.
Un culte aux allures de méga-show
Ouvreuses en costume blanc, régies à faire pâlir d'envie les professionnels du spectacle, traduction en six langues pour la diffusion internet : tout est millimétré sur la gigantesque scène balayée par les spots, flanquée d'écrans géants, où musiciens et choristes en robes longues entonnent des cantiques aux accents R'n'B.
Les 2h45 de culte sont ponctuées par des temps d'adoration en musique, durant lesquels les fidèles, debout, yeux fermés, louent longuement Dieu, les paumes tournées vers le ciel pour certains, la tête baissée sur leurs mains jointes pour d'autres.
Vient ensuite l'homélie ponctuée d'applaudissements enthousiastes et de vigoureux "amen" de l'assistance. Pendant une heure trente, le pasteur parle de délivrance, d’Esprit saint, du lien avec Jésus-Christ, de consolation. Mais le sujet du jour, ce sont ces "huit décisions qui feront de toi une personne constamment escortée par le Ciel".
"Reboostée"
"Décide de ne plus avoir honte de partager ta foi", "participe à la construction d’une Eglise en feu" : les fidèles sont exhortés à faire croître par l'exemple ICC, né en 2002, et qui revendique aujourd'hui 50.000 membres et 165 lieux de culte, surtout dans les pays francophones (Congo, Togo, Belgique, Canada...)
Et le pasteur Castanou a de grandes ambitions: "chaque année, on va doubler", promet-il après le culte.
La "Cité royale", plus grand centre d'ICC après Brazzaville, a coûté 60 millions d'euros, financés par les fidèles et des prêts bancaires.
Le modèle économique prévoit de louer ce centre des congrès, doté de multiples salles et de studios d'enregistrement, pour des mariages, séminaires d'entreprises et formations professionnelles.
Mais "on a aussi une énorme communauté qui a apporté", explique le pasteur, en allusion à la "diaspora afro-caribéenne" : "C'était un rêve de réaliser quelque chose en France pour des gens dont les parents souvent n'avaient pas été respectés ou avaient été victimes de racisme".
Après le culte, Lemaine Basile, très chic dans son ensemble sombre, témoigne de ce "plafond de verre" : "j'ai collectionné les masters, c'est pas pour ça que j'ai eu de super postes ! Notre foi nous permet de ne pas avoir de rancœur", explique cette juriste.
Parmi les fidèles, beaucoup racontent une conversion récente, telle Marie Santos, 38 ans, ancienne catholique : "J'ai tout fait, du baptême à la confirmation", mais "il manquait quelque chose, je sentais que c'était des dogmes" et "ça ne m'empêchait pas d'être dans la dépression".
"Ici la relation est directe, il n'y a pas d'intermédiaire", ajoute Ludivine Livio, enseignante en économie, qui ressort du culte "reboostée".
Le culte est terminé mais la journée n'est pas finie à la Cité royale, où beaucoup restent pour déjeuner ou étudier la Bible. Dehors, la navette déverse de nouveaux groupes, venus pour le "culte des jeunes" de 14H30. "La croissance n'est que le résultat de notre bonne santé", se satisfait le pasteur Castanou.
La Rédaction (avec AFP)