Un cessez-le-feu unilatéral décrété par la Russie en Ukraine à l’occasion du Noël orthodoxe est censé avoir commencé vendredi à 12 heures (heure de Moscou), une initiative dont la sincérité a été mise en doute par Kiev.
Suivant un appel du du patriarche orthodoxe russe Kirill, mais aussi une proposition du chef de l’Etat turc Recep Tayyip Erdogan, le président russe Vladimir Poutine a demandé jeudi à son armée d’observer un « cessez-le-feu sur toute la ligne de contact entre les parties à partir de midi le 6 janvier de cette année jusqu’à minuit le 7 janvier ».
Si elle est respectée, il s’agira de la première trêve d’ampleur en Ukraine depuis le début de l’invasion russe lancée en février. De courts arrêts des combats avaient précédemment été observés localement, comme pour évacuer les civils de l’usine Azovstal de Marioupol (sud-est) en avril.
L’Ukraine a toutefois balayé cette initiative comme un « acte de propagande ». Selon le président Volodymyr Zelensky, il s’agit d’une « excuse dans le but d’au moins arrêter l’avancée de nos troupes dans le Donbass et d’apporter équipements, munitions, et rapprocher des hommes de nos positions ».
Vladimir Poutine avait lui appelé les forces ukrainiennes à respecter cette trêve afin de donner la possibilité aux orthodoxes, la confession majoritaire en Ukraine comme en Russie, d' »assister aux offices la veille de Noël, ainsi que le jour de la Nativité du Christ ».
Dans un message diffusé quelques minutes après le début annoncé du cessez-le-feu, le chef adjoint de l’administration présidentielle ukrainienne Kyrylo Tymochenko a rapporté un bombardement russe sur Kherson (sud), qui a fait des victimes. Il n’a toutefois pas précisé quand cette frappe a eu lieu.
Les autorités séparatistes de l’est de l’Ukraine, citées par les agences de presse russes, ont elles rapporté le bombardement de leur bastion de Donetsk par l’armée ukrainienne 15 minutes avant l’entrée en vigueur théorique du cessez-le-feu.
« Gardez votre hypocrisie »
Jeudi, l’annonce de la trêve par Moscou avait provoqué le scepticisme en Ukraine.
« La Russie doit quitter les territoires occupés, c’est alors seulement qu’il y aura une ‘trêve temporaire’. Gardez votre hypocrisie », a réagi sur Twitter un conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak.
Pour le président américain, Vladimir Poutine cherche « à se donner de l’air ». Il « était prêt à bombarder des hôpitaux, des crèches et des églises (...) le 25 décembre et lors du Nouvel an », a ironisé Joe Biden.
Ce cessez-le-feu « ne fera rien pour faire avancer les perspectives de paix », a réagi le ministre britannique des Affaires étrangères James Cleverly, en réclamant un retrait définitif des forces russes. Une telle trêve n’apportera « ni liberté ni sécurité » en Ukraine, a abondé la diplomatie allemande.
Dans sa conversation téléphonique avec Vladimir Poutine, M. Erdogan avait proposé un « cessez-le-feu unilatéral » destiné à soutenir « les appels à la paix et les négociations entre Moscou et Kiev ».
La Russie est prête à un « dialogue sérieux » avec l’Ukraine à condition que celle-ci se plie aux exigences russes et accepte les « nouvelles réalités territoriales » nées de l’invasion de ce pays en février, a fait valoir Vladimir Poutine.
Moscou a revendiqué en septembre l’annexion de quatre régions occupées au moins partiellement par son armée en Ukraine, malgré de multiples revers militaires sur le terrain, sur le schéma de celle de la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014.
Volodymyr Zelensky insiste pour un retrait total des forces russes de son pays, Crimée comprise, avant tout dialogue avec Moscou. Dans le cas contraire, il promet de reprendre par la force les territoires occupés.
A l’occasion de ses discussions avec M. Erdogan, M. Poutine a accusé les Occidentaux de « gaver le régime de Kiev d’armes et d’équipements militaires et de lui fournir des informations opérationnelles et de ciblage ».
La trêve russe est proposée moins d’une semaine après une frappe ukrainienne dans la nuit du Nouvel An qui a fait au moins 89 morts à Makiïvka, dans l’est de l’Ukraine. Un bombardement particulièrement meurtrier que l’armée russe a dû reconnaître, fait extrêmement rare, et qui a suscité des critiques en Russie à l’encontre du commandement militaire.
La Rédaction (avec AFP)