Au Soudan, depuis le coup d'État du 15 avril 2023, au moins 8.5 millions de personnes ont été déplacées. Dans ce contexte de crise, les responsables d’églises craignent "que les extrémistes islamiques ne profitent de l'insécurité actuelle pour revenir au pouvoir et réimposer les lois de la charia" aux chrétiens.
La guerre civile fait rage au Soudan, opposant les Forces armées soudanaises (SAF) et les Forces de soutien rapide (RSF), un conflit qui a entraîné le déplacement d’au moins 8.5 millions de déplacés selon l’ONU, depuis le coup d'État du 15 avril 2023.
"L'intensité des combats ne laisse aucun répit aux civils, [...] il n'y a plus d'endroit sûr" témoigne l’ONG Médecins sans Frontières qui appelle à les protéger. Pour les chrétiens sur place considérés comme "oubliés et abandonnés" par l’ONG Portes Ouvertes, la situation est d’autant plus difficile, puisqu’ils sont victimes de discrimination liée à leur religion.
"Vivre dans un pays majoritairement musulman, classé au huitième rang de l’Index Mondial de Persécution des Chrétiens, est déjà difficile. Mais la violence a ajouté une pression supplémentaire."
Pour les déplacés internes, leur foi chrétienne est "une vulnérabilité supplémentaire" qui les discrimine notamment lors des distributions alimentaires. Les églises ne sont pas épargnées par cette violence. Ainsi, 150 églises ont été endommagées ou détruites depuis le début des affrontements. "Les chrétiens et les églises ont été attaqués en toute impunité" témoigne l’analyste de l’ONG.
Les responsables d’églises au Soudan craignent que l’insécurité actuelle vécue dans le pays laisse un "un vide de pouvoir" comme cela a pu être le cas en Libye. En outre, ils craignent que ce vide favorise le retour des extrémistes islamiques. Les lois de la charia pourraient ainsi de nouveau être imposées aux chrétiens, notamment celle sur le blasphème et sur l'apostasie.
"Il existe un réel danger que le Soudan devienne une autre Libye, où la chute du colonel Kadhafi en 2011 a laissé un vide de pouvoir. Cette situation a eu de graves conséquences pour la région, notamment le trafic d'armes et de stupéfiants, et a alimenté les conflits dans d'autres parties du continent, en particulier au Sahel, où elle a provoqué un désastre humain dramatique."
Entre 2019 et 2021 le gouvernement soudanais avait pourtant reconnu la liberté de croyance et de culte et avait annoncé la fin de la peine de mort pour apostasie. Un "vent de liberté" qui avait été stoppé après un coup d’État en octobre 2021, précise Portes Ouvertes.
Mélanie Boukorras