C’était, il y a quelques jours, le Boxing Day, un jour hautement commercial dans divers pays du Commonwealth. Pendant longtemps pourtant, ce jour fut celui d’une fête où l’on se tournait vers les autres comme Étienne, le premier martyr chrétien connu célébré le 26 décembre.
Le jour de la Saint-Étienne, au lendemain de Noël, voit ses traditions et idéaux concurrencés par les soldes sur lesquelles se ruent les clients. Dans un article du 20 décembre dernier consacré à ce fameux « Boxing Day », le National Geographic affirme avec ironie que le nom de cet événement n’a rien à voir avec le besoin de retourner aux magasins les cadeaux qui ne plaisent pas. Il n’est en effet point question de consumérisme dans l’origine du nom.
Ce jour-là, les Britanniques entonnent le chant « Good King Wenceslas », que l’on retrouve dans différents films, comme le célèbre « Love Actually » avec Hugh Grant campant un Premier ministre qui le chante pour des enfants. Un chant qui narre la légende d’un roi brodée autour de la vie de Saint Wenceslas, duc de Bohême duc soucieux des miséreux. Il raconte que le roi brava la neige « profonde, craquante et uniforme » pour aider un pauvre paysan lors de la Saint-Etienne et s’achève en appelant à bénir les démunis.
Une tradition de charité dans l’Église anglicane
Le National Geographic rappelle qu’il y a plusieurs origines possibles à cette fête dont le nom remonte à environ 1830.
Au cours des derniers siècles, les ouvriers, les domestiques ou les livreurs recevaient ce jour-là des pourboires . Une autre origine possible de la fête est le renvoi des domestiques chez eux le lendemain de Noël avec des restes du repas, tandis que leurs employeurs se contentaient également de restes. Certains historiens ont une autre théorie qui relie l’utilisation du mot « boîte » (boxing) aux boîtes de dons installées dans les églises durant le temps de l’Avent aux deuxième et troisième siècles après J.-C. ; elles étaient ouvertes le lendemain de Noël et l’on distribuait de l’argent aux pauvres.
Aujourd’hui, peu de Britanniques connaissent encore ces traditionnelles boîtes, observe Christianity Today. Certes, on donne toujours un pourboire aux commerçants, mais le sens de la charité chrétienne n’est plus largement répandu, l’esprit de communauté et de service s’efface.
Stephen Cottrell, l’archevêque anglican d’York n’entend pas renoncer à l’esprit de la fête : « Pour moi, le Boxing Day sera toujours et surtout le jour de la Saint-Étienne ». Le troisième personnage de l’Église d’Angleterre précise que « le calendrier chrétien nous rappelle le souvenir du premier martyr chrétien, le lendemain de la célébration de la naissance de Jésus. Aucune étable confortable n’est autorisée. Si nous choisissons de suivre cet enfant, il y aura des défis, il y aura des conflits, il y aura des conséquences ». Et l’ecclésiastique d’ajouter que le 26 décembre est pour lui « une promenade, une dinde froide, des bulles […] mais aussi une église ».
À travers le Royaume, diverses communautés maintiennent cette tradition des dons caritatifs, reçoivent pour un déjeuner des personnes seules et des familles. C’est par exemple le cas de l’Église St. Paul dans le centre de Londres qui offre une centaine d’assiettes.
À l’Église St. Stephen (Saint Etienne), on n’oublie pas que l’édifice cultuel est un témoignage de charité. Des résidents fortunés ont fait construire le bâtiment au milieu du XIXe siècle pour que les domestiques de la ville n’aient pas à voyager et payer des péages pour se rendre au culte. Le nom de l’Église évoque le service diaconal d’Étienne, elle est comme « un diacre, un serviteur pour les serviteurs de la ville », selon Andy Todd qui y officie comme prêtre.
Cet ancien employé du secteur industriel se remémore des lendemains de Noël commerciaux qui « donnaient l’impression d’être très replié sur soi et un peu superficiel » et vit aujourd’hui cette journée avec davantage de profondeur : « Venir à St. Stephen et mettre l’accent sur cette journée particulière est une véritable célébration de la communauté et du service ».
Jean Sarpédon