Quand l’Amérique d’Obama n’accueille quasiment pas de réfugiés chrétiens de Syrie

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11 491, c’est le nombre de réfugiés syriens accueillis aux États-Unis cette année fiscale, soit 15% au-delà du quota fixé à 10 000 et atteint en août. L’immense majorité est constituée de musulmans de différentes branches, essentiellement des sunnites (11 300 ou 98,33%).

Les chrétiens, toutes dénominations confondues, se dénombrent en présentant six fois les deux mains et moins quatre doigts la dernière, ils sont 56, ou 0,46% des réfugiés admis par Washington. En Syrie, les chrétiens représentaient autour de 10% d’une population de près de 22 millions d’âmes, sans compter les réfugiés irakiens venus trouver protection chez leur voisin dirigé par le laïque Assad.

La proportion comme les chiffres bruts peuvent surprendre, ils semblent cependant se situer dans la veine de la diplomatie américaine depuis l’arrivée de Barack Obama à la présidence en 2009. Si l’Amérique se faisait la championne de la protection des minorités les plus persécutées, depuis 7 ans et demi elle a discrètement opté pour une rupture avec sa préoccupation ostensible, sinon ostentatoire quant à la persécution religieuse, du moins celle subie par les chrétiens.

Entre le commencement du conflit en Syrie, en mars 2011, et décembre 2015, les États-Unis ont accueilli 2 000 musulmans et... 53 chrétiens. Autrement dit, 3 de moins que les 56 de 2016 quand, depuis, les chiffres ont explosé. Une partie du nombre de chrétiens reçus pour l’année fiscale allant du 1er octobre 2015 au 30 septembre dernier est même peut-être des 53 acceptés jusqu’en décembre. Proportionnellement, la part de chrétiens a été compressée.

Une diplomatie volontairement inerte au sujet des chrétiens persécutés...

Depuis ses débuts, l’Administration Obama aborde très succinctement la question de la liberté religieuse.Le rapport de 2012 du Département d’État, sous l’autorité du Secrétaire d’État Hillary Clinton, pour 2011 s’est contenté de survoler, résumer jusqu’à l’incompressible et synthétiser pour chaque pays les atteintes à la liberté religieuse, et de reprendre les précédentes données pour qui tenait vraiment à avoir davantage d’informations, peu mises à jour.

Un travail bien léger toutefois rendu au Congrès avec, qui plus est, trois mois de retard. Si l’on considère celui pour 2015, l’occurrence du mot « chrétien » dans l’aperçu général est de 16, celle du terme « musulman » de 17, et la persécution violente des chrétiens est moins mise en avant que celle subie par des musulmans ; plus encore, le rapport tend à présenter sous un angle positif les relations entre chrétiens et musulmans dans plusieurs situations – ainsi des musulmans protégeant des chrétiens dans un bus assailli par les islamistes d’al-Shabaab au Kenya -, ce qui ne serait que justice si le rapport ne semblait dissimuler derrière ces quelques actes de bonté l’immense problème de la persécution des chrétiens au nom de l’islam.

C’est l’aperçu général que risque de surtout lire le public, dont les journalistes censés parler de ces rapports et susceptibles d’avoir une lecture superficielle qui peut les tromper. Que le discours soit de conviction ou de complaisance, éventuellement accentuée par la volonté de se démarquer des années George W. Bush, quoi qu’il en soit la minimisation du sort des chrétiens semble bien être la cause des restrictions à leur accueil sur le sol américain, du moins y a-t-il une corrélation entre cette approche et cette réception très bornée.

Pourtant, environ la moitié des chrétiens a quitté la Syrie depuis 2011, disposant de beaucoup moins de chances de survie face aux djihadistes que les musulmans, puisqu’ils ont le choix entre la vie et la mort, ou au mieux de payer la djizîa, l’impôt islamique sur les Gens du Livre - les chrétiens et les juifs -, pour ne pas être assassinés. Proportionnellement, considérant les chiffres de la population syrienne d’avant le conflit, il représentent quatre fois plus parmi les réfugiés partis de Syrie que leur pourcentage de début 2011 dans la population nationale : parmi les 4 millions de réfugiés, un million se revendiquent du christianisme.

Le Centre Simon Wiesenthal, organisation juive, déclare d’ailleurs que les chrétiens devraient bénéficier de la priorité en matière d’accueil – les responsables religieux de Syrie préfèrent cependant conserver la présence chrétienne sur une terre qui a vu naître le christianisme. Mais l’Administration Obama fait la sourde oreille aussi bien quant à l’accueil qu’en ce qui concerne le soutien aux chrétiens face aux islamistes, au point de provoquer la colère d’un ancien cadre de l’Administration Clinton, la journaliste Kristen Powers qui a signé en avril 2015 dans USA Today un article au vitriol sur le président qui « parle des chrétiens uniquement pour leur faire la leçon au lieu de les sauver de la persécution ».

... En contradiction avec la politique d’accueil officielle

Une visite de la page Internet des Services de l’immigration et de la citoyenneté américains nous donne quelques conditions pour être accepté comme réfugié : le réfugié est celui qui a fui son pays pour cause de persécution ou par crainte de persécutions futures ; et, pour être éligible au statut de réfugié aux États-Unis, il faut notamment qu’il appartienne à un groupe possédant des caractéristiques spéciales dans certains pays déterminés par Washington. Il faut généralement qu’il ait déjà abandonné sa terre. Sur la page du Bureau pour les Populations, les Réfugiés et les Migrations, hébergé sur le site du secrétariat d’État, il est indiqué que « les États-Unis restent engagés dans leur aide aux enfants, femmes et hommes innocents affectés par l’actuel conflit en Syrie. »

Alors que la moitié des gouverneurs affirmaient qu’ils refuseraient les réfugiés syriens, quelques jours après l’attentat au Bataclan à Paris, et que la Chambre des Représentants votait un texte visant à suspendre l’accueil des réfugiés syriens et irakiens, réfugiés que certains députés disaient même n’accepter que s’ils étaient chrétiens, afin d’éviter tout risque d’attentat, Barack Obama a fustigé ces opposants qui, d’après lui, trahissent la « tradition de compassion » de l’Amérique, sans mot dire de sa propre compassion très sélective.

S’il est nécessaire de ne pas omettre la possibilité que des traducteurs arabophones musulmans favorisent les demandes de leurs coreligionnaires, l’éventuelle part de ces traducteurs ne peut être estimée. En revanche, la politique de Barack Obama, qui est même allé jusqu’à affirmer peu après son élection que les États-Unis étaient « l’un des plus grands pays musulmans au monde », et qui jusqu’à présent n’a que peu fait en faveur des chrétiens, laisse planer le doute sur la volonté d’accueillir ces derniers.

Une attitude très partisane, mais, dans un autre sens, sous George W. Bush, la secrétaire d’État Condoleezza Rice, avait décidé de ne pas favoriser les réfugiés persécutés pour des raisons religieuses au motif que la Maison-Blanche n’intervenait pas dans ces querelles, probablement pour ne pas attiser les tensions avec le monde musulman encore accrues, après les guerres d’Afghanistan et d’Irak, par le très critiqué et mal lu - si ce n’est probablement pas lu vu les critiques qui lui ont été adressées - discours du Pape Benoît XVI à Ratisbonne, mentionnant à titre d’illustration l’usage de la violence dans l’islam pour convertir.

Hans-Søren Dag


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