Commercialisation des gamètes et diagnostic préimplantatoire, l’eugénisme et la marchandisation du corps humain sont au coeur du débat sur la PMA sans père.
[Article mis à jour le 16/10/19]
Au sujet des États généraux de la bioéthique, dans le cadre desquels la PMA pour toutes avait pris une part importante, le professeur Jean-François Delfraissy, président du comité consultatif national d’éthique, précisait « la non-marchandisation du corps humain fait consensus ». Mais si ce principe fait « consensus », la réalité semble toute autre.
Gilbert Collard présentait, dans un rapport sur la proposition de loi constitutionnelle visant à rendre constitutionnel le principe d’indisponibilité du corps humain, et au sujet de la question de la GPA, une réalité déjà aux prises avec « la marchandisation du corps ».
« Nous savons, que nous le voulions ou non, que la marchandisation du corps est devenue possible ; nous devrions tous avoir l’honnêteté de le reconnaître, quel que soit notre point de vue sur la question. »
Avec l’élargissement de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules, la demande en gamète sera démultipliée. La PMA sans père imposera de fait une pénurie prévisible en gamètes, qui imposera elle, inéluctablement, la question du commerce international des gamètes et la problématique de l’eugénisme. Au Danemark, par exemple, il vous est déjà possible de choisir votre donneur en fonction de sa photo, de la couleur de ses yeux, de ses passions, voire même de sa religion.
Jacques Testart, Docteur ès Sciences, Directeur de Recherche honoraire à l’I.N.S.E.R.M., et « père scientifique du premier bébé éprouvette français né en 1982 », estime que l’on a « négligé l’aspect eugénique du choix du donneur ». Il évoque un « eugénisme mou et consentuel ».
« La disposition de spermatozoïdes en relative abondance à partir de géniteurs soigneusement évalués, et leur conservation dans des banques de sperme, ont ouvert la voie de la sélection des donneurs puis de leur ‘appariement’ avec les femmes receveuses, initiant ce qui apparaît comme une nouvelle forme d’eugénisme, mou et consensuel. »
En 2018, Laurence Sailliet, alors porte-parole des Républicains, confirmait elle aussi le « risque d’eugénisme » en cas de commercialisation des gamètes.
« Oui, nous le maintenons, il y a un risque d’eugénisme s’il y a commercialisation des gamètes. »
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D’eugénisme il est également question dans le cadre du diagnostic préimplantatoire (DPI), qui permet de diagnostiquer d’éventuelles anomalies génétiques ou chromosomiques dans les embryons conçus par fécondation in vitro (FIV), autrement dit de réaliser un tri sur des êtres vivants. Depuis son autorisation en 1994, le DPI n’a eu de cesse d’étendre les possibilités de tri des embryons. Lors de la première loi de bioéthique en 1994, il a été autorisé pour « éviter la transmission à l’enfant d’une maladie d’une particulière gravité ». En 2000, « la transmission d’un risque pathologique » succède à « la transmission d’une pathologie ». Dès 2009, il est possible de « soumettre les embryons à la détection d’autres pathologies (trisomies) qui ne sont pas identifiées chez les parents ». Et selon le site d’actualité bioétique, Généthique, le DPI dépasse déjà ces limites à l’étranger.
« Le DPI est déjà utilisé ailleurs qu’en France pour le choix du sexe (exemple : USA) ou pour éviter certaines caractéristiques sans pronostic vital (exemple : strabisme en GB). En France, il permet d’éliminer des embryons porteurs de handicaps relatifs comme l’hémophilie ou de risques aléatoires de pathologies. L’évolution des usages proposés et/ou autorisés du DPI, dont il faut reconnaître qu’elle est plus lente en France que dans d’autres pays, progresse dans le même sens partout : celui d’une ouverture de plus en plus large des indications médicales justifiant le tri des embryons. Or, aucune nouvelle découverte scientifique ou innovation technique ne justifie chacune de ces ‘avancées’. »
Jacques Testart évoque cette « qualification d’eugénisme » en ce qui concerne le DPI.
« Il faut souligner l’efficacité sélective considérable du DPI par rapport aux pratiques eugéniques classiques, lesquelles visaient le choix des géniteurs. En effet, le génome de l’embryon est celui de la personne à venir tandis que les géniteurs ne portent que des éventualités de réalisation génétique. Pourtant, le qualificatif ‘eugénisme’ demeure vague jusque dans le code pénal qui définit comme crime social majeur ‘le fait de mettre en oeuvre une pratique eugénique tendant à l’organisation de la sélection de personnes’ mais sans définir cette pratique. »
Ce dernier en appelle à un « consensus international » autour de la limitation du DPI et évoque « l’honneur » que serait pour la France la défense de cette proposition.
« Nous pensons que la seule mesure sérieuse d’opposition à cette perspective consiste à limiter le DPI à un seul trait génétique pour l’ensemble des embryons conçus par un couple. [...] Il reste qu’une telle mesure ne constituerait un garde-fou efficace contre l’eugénisme qu’à la condition d’un consensus international. Ce pourrait être à l’honneur de la France de défendre cette proposition. Mais le temps presse : chaque année qui passe avec son lot de ‘progrès’ fabrique aussi de l’irréversible. »
La PMA pour toutes annihilerait le principe constitutionnel de l’indisponibilité du corps humain, « principe essentiel du droit français » selon la Cour de cassation, ouvrant ainsi la voie à la marchandisation du corps. La marchandisation du corps et l’eugénisme ne sont pas seulement l’apanage de la GPA. Force est de constater que ces problématiques s’imposent de fait dans le débat de l’élargissement de la PMA à toutes les femmes.
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M.C.
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