Philippines : des familles en larmes prient à l'église pour que Duterte paie pour ses crimes

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Des prières d'action de grâce, des pleurs silencieux : à Manille, des familles touchées par la perte d'un proche dans la "guerre à la drogue" menée par l'ancien président des Philippines Rodrigo Duterte se sont retrouvées à la messe pour célébrer son arrestation.

Qui mère, qui veuve, des fidèles de l'église du Sacré-Cœur sont venues avec le portrait de leurs proches tués durant cette période, le posant délicatement au pied de l'autel. 

Dans ce faubourg de la capitale philippine, pays catholique pratiquant d'Asie du sud-est, ces paroissiennes confient que l'arrestation de M. Duterte, permise par son successeur Ferdinand Marcos, et les poursuites pour crimes contre l'humanité à son encontre, sonne pour elles comme "une prière exaucée".

"Mon fils a maintenant obtenu justice", dit à l'AFP Luzviminda Dela Cruz, dont le fils de 19 ans a été abattu par la police après un raid visant le domicile de proches en 2017. 

Vêtue d'un t-shirt bleu ciel floqué du mot "Justice", cette mère de famille avoue qu'elle a "prié pour ça tous les jours" et qu'elle ressent du soulagement et "une forme de joie inexplicable".

Dans son homélie, alors que des larmes roulent sur les joues de l'assistance, le père Flaviano Villanueva évoque le désespoir des familles qui attendent encore que justice soit faite.

L'annonce de l'arrestation de M. Duterte ressemble aux portes trop longtemps closes d'une prison qui se sont soudain ouvertes, compare-t-il. 

Après l'office, ce grand détracteur de la "guerre contre la drogue" de l'ancien président confie à l'AFP : "J'espère que cette arrestation va ouvrir la voie à une complète guérison de notre pays, pour que les gens se rappellent que la justice compte par-dessus tout". 

"Le Seigneur nous a entendus"

Rodrigo Duterte a été président des Philippines de juin 2016 à juin 2022 et selon les procureurs de la Cour pénale internationale à La Haye, sa lutte au mépris des procédures contre les trafiquants et consommateurs de drogue a fait 12.000 à 30.000 morts, surtout des hommes pauvres. En détention préventive depuis mardi, il ne s'est jamais excusé pour son action. 

Son arrestation est "la preuve que le Seigneur nous a entendus", juge Sofia Joveres, une veuve venue assister à la messe, qui n'est cependant "pas totalement contente".

"Honnêtement, je ne suis pas heureuse même si Duterte a été arrêté. Cela ne fait pas revenir en vie le mari qu'ils m'ont enlevé sans pitié avec la guerre à la drogue", ajoute cette dame de 45 ans, entre deux sanglots.

Elle dit que son mari a été forcé à sortir de leur domicile par une douzaine d'officiers de police en uniforme un beau jour de 2016 à Manille.

Elle ajoute que ses voisins lui ont raconté que la police avait ordonné à son mari de courir le plus vide possible avant de l'abattre, et elle prie aujourd'hui pour que l'ancien président assume ses responsabilités et paye pour les crimes commis au nom de la lutte contre la drogue.

"C'est important que M. Duterte le reconnaisse car il a été à la racine de toute cette peine et de toute cette violence que nous avons endurées", souffle-t-elle.

La Rédaction (avec AFP)

Crédit image : Shutterstock / Simon Roughneen

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