Personne n’est épargné par les épreuves. Comment les traverser de la meilleure des manières ? Où trouver de l’aide ? Analyses et témoignages.
Conseillère en relation d’aide et conférencière, Isabelle d’Aspremont-Lynden a vécu plusieurs pertes qui l’ont amenée à réfléchir à la question du deuil. Auteur de plusieurs ouvrages, dont Excusez-moi je suis en deuil (éd. Novalis), elle donne de précieux encouragements aux femmes qui passent par l’épreuve
Face aux épreuves de la vie, un réflexe de l’être humain est souvent d’accuser Dieu. Pourquoi ?
Cela vient du besoin de trouver un coupable, un responsable. Cela peut être Dieu, ou la vie, ou les soignants. Au lieu de chercher la solution à l’intérieur de soi, on la cherche à l’extérieur. Mais d’autres personnes choisissent une autre approche, en cherchant à savoir ce que Dieu veut leur enseigner, ce qu’il a à leur révéler. Un oncle me disait: « Si tu traverses cette épreuve, c’est que Dieu pense que tu es assez forte pour ça ». Cela me révoltait. Je ne voulais pas d’un tel Dieu.
Certaines épreuves sont la conséquence d’un choix personnel. Dans ce cas, comment faire face à la culpabilité ?
La culpabilité est une tendance féminine: les femmes vont se remettre en question, alors que les hommes vont plutôt réagir par la colère. Si notre responsabilité est engagée, on peut réparer par des actes. Mais il ne faut pas que la culpabilité prenne une forme obsessionnelle. S’accuser de tout, y compris de ce dont on n’est pas coupable, peut conduire à la dépression. Comme la culpabilité est la continuité de la colère, il est aussi nécessaire d’exprimer celle-ci en trouvant un exutoire, par exemple l’écriture ou le sport. Si l’on refuse cette émotion, elle va se cristalliser à l’intérieur de nous et avoir des effets psychosomatiques telles que des tensions ou maladies
Quels sont les atouts de la chrétienne pour aborder une épreuve ?
D’une part, la chrétienne croit en la résurrection, en la vie après la mort, ce qui est d’un précieux réconfort. D’autre, part, elle se sait accueillie par Dieu, portée par sa présence, même si on ne la ressent pas. J’aime cette histoire des pas sur le sable. Un homme rêve qu’il marche avec Dieu sur la plage. A la fin de sa vie, il se retourne et s’aperçoit que, dans les moments les plus difficiles, il n’y a qu’une seule trace de pas. Il demande alors à Dieu pourquoi celui-ci l’a abandonné lorsqu’il avait le plus besoin de lui. Dieu lui répond: Lorsque tu ne vois qu’une trace de pas, c’est que je te portais dans mes bras. Cette histoire m’a aidée, et c’est aussi l’expérience que j’ai vécue personnellement.
De nombreux personnages bibliques ont été confrontés à l’épreuve. Que peut-on tirer de leur expérience ?
Tous ces personnages bibliques se sont tournés vers Dieu et lui ont exprimé leur ressenti, même leur colère. On a le droit de se fâcher contre Dieu. La colère n’est pas comme la haine ou le ressentiment: une fois exprimée, elle s’évanouit. Quand on traverse une épreuve, on entre aussi dans une sorte de patience et l’on peut découvrir sa mission dans la vie, se sentir appelé à aider d’autres ou la communauté.
Prenons l’exemple de Jonas: il s’enfuit à l’opposé d’où il doit aller, il est jeté à la mer, avalé par un gros poisson, rejeté sur la plage, mais il finit par accomplir sa mission. C’est comme si, quelque part, il y avait dans notre âme quelque chose qui nous tient. Même si on ne cherche pas sa mission, c’est elle qui nous cherche.
On entend dire parfois: Ce qui ne tue pas rend plus fort. Etes-vous d’accord avec cette maxime ? Avec du recul, l’épreuve nous rend-t-elle plus aptes à différencier l’essentiel du superflu ?
Oui, cette maxime est vraie, mais ce n’est pas quelque chose à dire à une personne qui traverse un deuil! Je constate à quel point mes épreuves m’ont rendue plus mature, ont transformé mes valeurs et m’ont fait retrouver une spiritualité. Alors, oui, je peux dire que j’ai grandi.
Accepter de traverser ses souffrances, c’est trouver l’émergence de la vie. On en ressort différent. Si l’on parvient à profiter de son épreuve, on peut acquérir une meilleure connaissance de soi, mieux comprendre la souffrance des autres, emprunter une nouvelle voie professionnelle ou familiale, reprendre des études, s’engager dans du bénévolat... Le perdant est celui qui s’immobilise. La vie ne peut être que résurrection continue face aux épreuves.
S. Roulet
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