Il y a 30 ans, quand les jeux vidéos commençaient à s’installer vraiment dans le paysage, tout le monde le prédisait : les jeux de société allaient disparaître. Trente ans plus tard, force est de constater que les prophètes de malheur s’étaient trompés. Car le jeu de société se porte bien. Et même très bien.
Rien qu’en France, il se vend en moyenne un jeu de société par seconde. Chaque année, le marché du jeu de société grimpe de 10 à 15%.
Car si les jeux vidéos ne sont pour beaucoup pas les plus propices à l’échange et à la discussion entre les participants, il en va tout autrement des jeux de société. Le public a besoin de se retrouver autour d’une table, en famille, entre amis, et de rire ensemble, ou d’apprendre ensemble. Le jeu de société, c’est avant tout une expérience conviviale partagée, sans nécessairement avoir à sortir de chez soi.
Et de fait, on compte aujourd’hui en France 500 boutiques de jeux et des associations de joueurs un peu partout sur le territoire, qui se retrouvent le week-end pour partager autour d’un verre.
Les églises s’y mettent aussi. Ici et là, des soirées jeux s’organisent. Un moyen ludique et convivial par excellence pour apprendre à se connaître, à intégrer les nouveaux, à découvrir des talents cachés.
Conséquence : les éditeurs chrétiens se structurent et multiplient les possibilités de jouer.
Il y a deux ans, le SEL éditait “Les Villageois de Baobila” pour sensibiliser à la pauvreté de façon ludique. L’association Bible et Jeux éditait “Hag Sameah” pour faire découvrir les Fêtes de l’Eternel selon la Bible. Pendant ce temps, les maisons iCharacter ou Excelsis proposaient des jeux de cartes pour enfants ou pour adultes.
D’autres visent un public plus large, inspiré des valeurs chrétiennes. Ainsi en est-il des jeux “2 minutes” qui, depuis 4 ans, visent à débloquer la discussion en famille ou entre amis. Une version “2 minutes en famille” est d’ailleurs en train de voir le jour.
L’histoire de l’Arche de Noé est un support particulièrement intéressant, car la thématique des animaux, universelle et mignonne, a été reprise y compris par des maisons d’édition séculières. En sortant son dernier bébé “Les rescapés de déluge”, l’association Bible et Jeux, que préside Thomas Castillo, vise ainsi à créer un jeu basé sur la Bible, mais pour lequel aucune connaissance biblique - ni même aucune foi - n’est requise. C’est une manière d’amener la population, en douceur, à se réapproprier les histoires bibliques qui fondent notre société mais qu’ils ont oublié.
Ainsi, le jeu de société se veut aussi moyen d’évangélisation. Car l’annonce de la Bonne Nouvelle a toujours su s’adapter à son époque et à son contexte.
A ce titre, l’initiative de l’association ResKP mérite d’être soulignée. En proposant un jeu de cartes à télécharger et imprimer à la maison, nommé “ResKP”, elle s’assure une diffusion plus large, à moindre coût. Et le message qui passe, c’est d’oser attraper la bouée pour être sauvé. Une approche ludique qui permet d’engager les discussions sur des sujets pertinents, de présenter des solutions, et de s’approprier une manière de penser qui consiste à ne pas compter uniquement sur ses propres forces.
L’Evangile, en somme.
Pascal Portoukalian