Récemment je regardais à la télévision une émission où une experte vient aider un artisan à sauver son commerce de la faillite. Peu intéressé au début, le développement de l’histoire finit par attirer mon attention au point que j’aimerais aujourd’hui vous en raconter le contenu.
Un artisan gérait depuis plus de quinze ans un commerce au début florissant mais qui depuis plusieurs années déclinait irrémédiablement sans qu’il ne sache véritablement ni pourquoi, ni comment faire pour stopper l’hémorragie. Quelques mois de plus ainsi et il aurait l’obligation de fermer boutique.
En tant que pasteur, je n’ai pas pu m’empêcher de faire immédiatement un parallèle entre l’histoire qui se déroulait et celle de certaines assemblées qui traversent une crise prolongée, sans que les bonnes volontés du pasteur ni celles de ses équipiers ne puissent véritablement changer les choses.
Bien entendu, “il n’est pas possible de comparer la vie d’un commerce avec celle d’une église” me direz-vous et je suis d’accord… quoique ?
L’analyse des causes des problèmes que fit l’experte, ainsi que les solutions qu’elle préconisa m’amenèrent à réfléchir et à oser le parallèle avec certaines crises que des assemblées rencontrent.
D’abord, l’aspect de leur boutique était triste, sans claire direction. Leurs produits sans attrait. Le personnel était découragé, malgré leur jeune âge et leur désir d’amélioration. Enfin, le gérant était au bord de l’épuisement physique et de la dépression…
Cela vous semble familier ?
Rapidement, la conseillère le prit à part pour lui demander comment il dirigeait son commerce et son équipe, et ce qui ressortit de la conversation fut révélateur: quand elle lui demanda comment il décidait quels gâteaux il allait faire, leurs goûts et couleurs, il répondit “qu’il faisait ce qu’il avait appris à faire, et qui avait fonctionné depuis toujours”. Sauf que ses produits ne correspondaient plus du tout au contexte et goûts actuels, et que plus personne ne venait.
En le regardant travailler, elle vit ensuite qu’il ne déléguait rien. Il restait en contrôle de tout le processus du début à la fin, manageant étroitement le travail de chacun, ne faisant totalement confiance à personne. Il refusait quoi que ce soit qu’il ne connaisse déjà ou qu’il ne puisse maîtriser lui-même. Ce désir qui peut paraître louable sur le principe, se révèle vite mortifère quel que soit le contexte.
C’est alors que la conseillère donna la parole au personnel, trois jeunes femmes et un homme qui très vite se révélèrent avoir de nombreuses qualités, de l’imagination et des compétences très largement sous-estimées et sous utilisées. Ils avaient une compréhension claire de ce qui n’allait pas mais refusaient d’aller à l’encontre du responsable pour ne pas l’offenser ou donner l’impression de lui manquer de respect.
Ils craignaient ses colères et n’osaient pas contester sa gestion. Ils ne voulaient même plus proposer quoi que ce soit de nouveau, sachant d’avance qu’ils essuieraient un “non” catégorique de sa part.
Que se passait-il chez cet homme? Lui, tout autant que ses employés n’avaient qu’un seul objectif: réussir ! Et pourtant rien ne fonctionnait.
Comme d’autres responsables, il se trouvait en fait confronté à son “seuil personnel d’incompétence”.
De quoi s’agit-il ?
Pour faire simple, c’est le niveau au-delà duquel quelqu’un n’est plus compétent, c’est-à-dire, ne sait plus accomplir une tâche, une responsabilité seul, sans l’aide d’une formation spécialisée et/ou le soutien d’une équipe compétente et responsabilisée.
Comment reconnaître que l’on a atteint son propre “niveau d’incompétence” ?
Cela arrive paradoxalement souvent quand après avoir bien “réussi” dans certaines fonctions, un responsable reçoit une promotion qui fait de lui ou d’elle le/la leader d’une plus grande équipe, ou de plus de projets, ou d’une plus grande… assemblée! Mais qui s’avère être en fait au-delà des qualités “managériales” que cette personne possède.
Le responsable concerné ne peut plus mener à bien la mission qui lui est confiée. Les recettes qui avaient fait son “succès” dans le passé ne sont plus suffisantes, ni adaptées au nouveau contexte.
Quels sont les symptômes ?
Perte de la joie dans le travail, plus de “réussite” facile, augmentation du stress, crispation psychologique, autoritarisme destiné à masquer les peurs intimes, sentiment de devoir tout contrôler, peur d’être dépassé par d’autres responsables plus qualifiés, de perdre leur respect, rejet de ces personnes et de celles qui connaissent nos “faiblesses”, besoin de s’entourer de membres de sa famille, de proches, ou de personnes totalement soumises, redevables ou estimées “inférieures” en qualifications… avec comme corollaires: stagnation, régression des résultats et échec.
Cela peut-il aussi arriver à un responsable dans l’oeuvre de Dieu ? Nous savons tous que oui.
Quelles sont les solutions ?
Comme celles, apportées dans l’émission, qui relancèrent l’entreprise:
Tout d’abord reconnaître et accepter nos propres limites.
Croyons-nous en tant que responsables, que Dieu ne peut s’exprimer qu’au travers de nous et pas par d’autres personnes ? Que nous possédons seuls la solution à tous les problèmes ?
Tout le monde a un seuil d’incompétence, là n’est pas le problème! Personne ne peut tout savoir. Le reconnaître et bien réagir est ce qui détermine un bon leadership!
Acceptez de vous remettre régulièrement en question, n’arrêtez jamais d’apprendre et de vous former.
Puis, redessinez et élargissez le cercle autour de vous: Entourez-vous de personnes plus qualifiées que vous, pour emmener le travail plus loin!
Ecoutez-les, confiez-leur de vraies responsabilités. Laissez-les essayer de nouvelles choses. Devenez leur inspiration et non leur “tortionnaire” ! Ils sont très différents de vous ? Alléluia, c’est une richesse pour atteindre le monde !
Vous avez autour de vous des trésors donnés par Dieu qui attendent d’être découverts, les réponses à vos prières !
Pierre utilisa les compétences de Marc pour écrire un évangile. Paul en eut lui aussi besoin, les regardons-nous comme de piètres apôtres pour autant ?
Pour finir, souvenons-nous des paroles de Paul dans 1 Corinthiens 3:5-9: l’oeuvre de Dieu est avant tout un travail d’équipe !