Le Premier ministre israélien s’oppose à une proposition de loi contre le prosélytisme chrétien

Le Premier ministre israélien s’oppose à une proposition de loi contre le prosélytisme chrétien

Une proposition de loi déposée par des élus ultra-orthodoxes vise à punir d’une peine de prison l’évangélisation en Israël. Le texte inquiète profondément les chrétiens, accusés de monnayer les conversions, mais le chef du gouvernement, Benyamin Netanyahou, a annoncé qu’il s’y opposerait.

Le 19 mars dernier, le média All Israel News a mis en ligne sa traduction d’un texte proposé au président de la Knesset, le parlement israélien, et intitulé « Projet de loi pénale : Amendement – Interdiction de la sollicitation à une conversion religieuse ». La proposition déposée le 9 janvier par les députés Moshe Gafni et Yaakov Asher, membres de la coalition religieuse Yahadut Hatorah (Judaïsme unifié de la Torah) au sein de la majorité parlementaire, prévoit une peine d’un an d’emprisonnement pour quiconque « sollicite une personne, directement, numériquement, par courrier ou en ligne afin de la convertir sa religion ». La minorité est une circonstance aggravante, deux ans d’incarcération sont prévus si la personne abordée est mineure au moment des faits.

Les deux parlementaires justifient leur proposition en affirmant que « récemment, les tentatives de groupes missionnaires, principalement chrétiens, d’inviter à la conversion religieuse se sont multipliées ». Affirmant que « parfois, ces tentatives n'impliquent pas de promesses monétaires ou de gains matériels et ne sont donc pas illégales selon la loi en vigueur », ils objectent toutefois qu’elles engendrent de « nombreuses répercussions négatives, y compris des dommages psychologiques [qui] justifient l'intervention du législateur ». Selon eux, dans la plupart des cas, les chrétiens prosélytes « ciblent les classes les plus faibles qui, en raison de leur statut socio-économique, sont plus facilement ouvertes à de telles tentatives de persuasion. »

Netanyahou face à l’inquiétude des chrétiens

La traduction par All Israel News, reprise notamment par le média américain de droite Newsmax le jour même, a alerté les chrétiens outre-Atlantique, particulièrement les évangéliques, important soutien pour Israël, mais également d’autres dénominations. Selon une étude du Pew Research Center publiée le 26 mai 2022, 86 % des évangéliques blancs américains soutiennent Israël, tout comme 58 % des Noirs protestants, ou 67 % de leurs compatriotes catholiques. Cet important appui a permis de développer des projets humanitaires en Israël et a conduit à la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël par le président Donald Trump.

Le 22 mars, le Premier ministre a publié sur Twitter un message en hébreu et en anglais se voulant rassurant : « Nous n’avancerons aucune loi contre la communauté chrétienne. »

Juergan Buehler, le président de l’Ambassade chrétienne internationale à Jérusalem, a remercié Netanyahou et déclaré :

« Le Premier ministre a fait beaucoup, tout au long de sa longue carrière politique, pour renforcer et pour conserver les relations entretenues par Israël avec les chrétiens du monde entier, et nous lui rendons avec chaleur son acceptation de notre communauté. »

Une habitude des ultra-orthodoxes

De telles propositions sont habituelles en Israël où, à chaque nouvelle législature, des députés religieux déposent des projets de loi pour interdire le prosélytisme. Mais cette fois-ci la forte médiatisation du texte traduit a provoqué un vent de panique plus important. De plus, ses auteurs sont membres d’une coalition qui possède sept sièges sur les 120 de Knesset, alors que le gouvernement a une majorité de 64 députés, et les élus des autres partis religieux pourraient soutenir le texte. Bien que numériquement faible, l’appui de Yahadut Hatorah est important pour le gouvernement.

En 1998, les députés ultra-orthodoxes avaient inquiété les organisations évangéliques soutenant Israël avec un texte visant à criminaliser l’évangélisation. Gafni a proposé un texte similaire l’année suivante, bloqué par Netanyahou, avant d’en déposer un autre en 2013 rejeté par tous les partis sauf les ultra-orthodoxes. Les tentatives suivantes en 2015 et 2021 n’ont pas abouti en raison de la dissolution de la Knesset.

La question de la conversion des juifs au christianisme est un sujet de crispation, notamment en raison des conversions forcées au cours des siècles et de la peur d’une disparition de l’identité juive.

Jean Sarpédon

Crédit image : Shutterstock / Ververidis Vasilis


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