La Cour suprême américaine divisée refuse d'autoriser une école religieuse financée sur fonds publics

La Cour suprême américaine, à majorité conservatrice, a confirmé jeudi de justesse l'interdiction d'une école religieuse à gestion privée qui aurait bénéficié de financements publics, décision importante pour le principe de séparation de l'Église et de l'État.
Cette "charter school", école à gestion privée sous contrat à financement public, aurait été la première à être administrée par un culte, en l'occurrence l'Église catholique.
La Cour suprême, exceptionnellement divisée également, avec quatre voix pour et quatre voix contre, a ainsi confirmé l'interdiction de cet établissement par la justice de l'État d'Oklahoma (sud).
Ce cas de figure s'explique par le fait qu'une des neuf juges de la Cour, la conservatrice Amy Coney Barrett, s'était récusée de ce dossier, vraisemblablement en raison de ses liens avec certains juristes défendant la création d'écoles religieuses sous contrat.
Le détail des votes n'est pas précisé dans la décision, mais le président de la Cour, John Roberts, aurait pu joindre sa voix à celles des trois juges progressistes.
Lors des débats le 30 avril, la plupart des cinq magistrats conservateurs s'étaient montrés réceptifs aux arguments des plaignants, soutenus par l'administration Trump.
L'affaire est potentiellement lourde de conséquences pour des millions de familles, la quasi-totalité des 50 États américains autorisant les "charter schools".
"Confusion"
Pour la première fois, en 2023, les autorités scolaires de l'Oklahoma, dans le Sud conservateur, ont autorisé une "charter school" administrée par un culte.
Cet établissement prodiguant des cours en ligne, baptisé Saint Isidore de Séville, n'a encore jamais fonctionné. La Cour suprême de l'Oklahoma, saisie par le procureur général républicain de l'État, Gentner Drummond, a en effet considéré que sa création violait la Constitution américaine ainsi que celle de l'État.
Le Premier amendement de la Constitution américaine prohibe notamment l'établissement d'une religion nationale ou la prééminence d'une religion sur une autre.
Mais les plaignants, représentés par la très conservatrice Alliance Defending Freedom (ADF), ont fait valoir que l'exclusion des écoles confessionnelles du système de financement public des "charter schools" contrevient à une autre clause du Premier amendement, celle qui garantit la liberté de culte.
Les débats devant la Cour avaient largement porté sur la nature publique ou privée de ces établissements, eu égard à leur financement, et en conséquence sur les obligations que peuvent leur imposer les États.
L'avocat de l'Oklahoma, Gregory Garre, avait mis en garde contre la "confusion" qui résulterait d'une décision en faveur de Saint Isidore, soulignant qu'elle "aboutirait non seulement à la création de la première école publique religieuse du pays", mais "rendrait aussi inconstitutionnel le programme fédéral d'écoles sous contrat et les lois sur les "charter schools" dans 47 États".
La majorité conservatrice de la Cour s'est montrée ces dernières années favorable à une extension de la place de la religion dans l'espace public, notamment dans le domaine de l'éducation.
En 2022, elle a ainsi obligé l'État du Maine (nord-est) à inclure les écoles confessionnelles dans un dispositif de subventions publiques, jugeant leur exclusion "discriminatoire envers la religion".
La majorité conservatrice avait également la même année invalidé le licenciement par les autorités scolaires d'un entraîneur de football américain de la région de Seattle (nord-ouest) qui priait sur les terrains.
La Rédaction (avec AFP)