« J’ai choisi de croire en Dieu quand je suis devenu sobre » : Stephen King parle de sa foi avec l’archevêque de Cantorbéry
Stephen King a été interviewé dimanche par l’archevêque de Cantorbéry, Justin Welby sur BBC Radio 4. Le célèbre auteur s’est confié, entre autres, sur sa vision de l’Eglise, sur sa foi personnelle et ses anciennes addictions.
Dans le cadre d’une nouvelle série de podcasts pour BBC Radio 4, l’archevêque de Cantorbéry Justin Welby a interviewé plusieurs personnalités ayant « apporté une contribution significative à la vie publique » pour parler de leur foi et de spiritualité.
Avant de rentrer dans le vif du sujet et de parler de sa foi personnelle, l’auteur commence par évoquer la représentation de certains aspects de la religion dans ses livres. Il explique que son « problème » avec l’institution de l’église vient du fait que beaucoup d’églises mélangent religion et politique.
« Mon problème c’est que beaucoup d’églises ont confondu la politique avec la religion. Les gens […] oublient que Jésus a dit de rendre à César ce qui appartient à César, qu’il faut laisser à Dieu ce qui appartient à Dieu. Ce sont des choses séparées qui doivent rester séparées. »
Il déclare être plutôt en faveur d’une croyance en un « Dieu personnel que chacun comprend » bien qu’il ajoute que « dans la plupart des cas », l’église est « ouverte ». « Elle donne, prend place dans la communauté, et j’adore ça », continue l’auteur de Shining.
Une foi personnelle
À propos de sa foi, Stephen King confie avoir choisi « de croire en Dieu » lorsqu’il est devenu sobre, il y a de très nombreuses années. Evoquant son combat contre les drogues et l’alcool, il révèle que c’est grâce à l’un de ses parrains des Alcooliques Anonymes qu’il a commencé à prier.
C’est alors qu’il a décidé de se confier à Dieu, en gardant « les choses simples » précise l’écrivain à succès qui raconte prier le matin pour demander au Seigneur de l’aider à rester sobre. Et prier à nouveau le soir pour le remercier de l’avoir aidé à tenir une journée de plus.
Stephen King, qui est maintenant sobre depuis plus de 33 ans, estime que cette expérience lui a « certainement permis de vivre une vie plus spirituelle à bien des égards ».
L’Exorciste, « un film optimiste »
Justin Welby l’interroge ensuite sur la question du Bien et du Mal, pointant notamment certains thèmes de ces ouvrages qui lui ont valu le surnom de « roi de l’horreur ».
« La question qui me hante et qui revient dans mes livres encore et encore, c’est à quel point le Mal vient de nous. À quel point on l’a dans la peau », confie l’auteur. Il développe son propos en déclarant qu’à ses yeux L’Exorciste est un film « très optimiste » puisque la petite fille étant possédée par un démon, elle n’a elle-même rien fait de mal. « Ça venait de l’extérieur, c’est une entité surnaturelle. Comme Dieu », continue King.
Il conclut cette partie de l’entretien en évoquant une histoire de la Bible qui est à ses yeux « la meilleure histoire surnaturelle jamais écrite ».
« Je pense qu’on ne peut pas résoudre le problème de Mal extérieur et Mal intérieur. Il y a des histoires sur les deux, dans la Bible, et une de mes préférées c’est quand Jésus rencontre un homme possédé. Quand il lui demande son nom, l’homme répond ‘mon nom est légion’. Pour moi ça a toujours été la meilleure histoire surnaturelle jamais écrite. »
La puissance du pardon
L’archevêque questionne ensuite l’écrivain sur le grave accident de voiture qui a failli lui coûter la vie en 1999 et qui lui a laissé de graves séquelles, notamment des douleurs chroniques. L’occasion pour les deux hommes de parler du pardon.
Justin Welby revient à son tour sur un événement difficile de son existence, lorsqu’il a perdu un de ses enfants il y a plusieurs années dans un accident de voiture.
« Je crois au pardon et à la rédemption », affirme le représentant de l’église anglicane, « mais en ce qui me concerne, j’ai réalisé que je suis moins bon pour pardonner que ce que ma fonction ne le demande, et certainement moins que ce que je voudrais », continue-t-il avec humilité.
Stephen King estime lui qu’il ne sert à rien « de garder de la rancune », « d’être en colère contre les gens ».
« Ai-je pardonné à Bryan Smith [l’homme qui l’a renversé en 1999 NDLR] de m’avoir renversé ? Non. Est-ce que je le détestais, est-ce que je voulais l’avoir, étais-je en colère contre lui ? Non », affirme l’écrivain qui estime que cet événement, aussi difficile soit-il fait partie de sa vie sans qu’il y ait nécessairement d’explication.
« J’essaye chaque jour d’aimer la vie »
En conclusion, l’archevêque de Cantorbéry questionne l’auteur de Ça et de La Ligne verte sur l’amour : « quand avez-vous eu la plus profonde expérience d’aimer et d’être aimé ? ».
En toute simplicité, Stephen King répond en parlant de sa famille et affirme essayer « chaque jour d’aimer la vie ». Une déclaration qui, selon l’écrivain, risque de faire lever les yeux au ciel de nombreux auditeurs. Pourtant, il l’assume, rappelant que du haut de ses 74 ans, il est plus que conscient du temps qui passe.
« Avec ma famille. Ma femme, mes enfants, mes petits-enfants, même mon chien. J’essaye chaque jour d’aimer la vie. Je sais que cela sonne comme une platitude vide, lorsque les gens vont entendre ça ils vont lever les yeux. Mais ce que je veux dire c’est que le temps file entre nos doigts. Le temps c’est comme de l’eau. Il file. C’est vrai, parce qu’hier j’avais 16 ans, et aujourd’hui j’ai 74 ans. J’essaye chaque jour de regarder autour de moi, le ciel, les plantes… J’essaye de trouver une chose pour laquelle je peux non seulement être reconnaissant, mais également que je peux aimer pour ce moment. C’est mon devoir. »
Camille Westphal Perrier