L'armée israélienne a accepté d'observer des pauses de quelques heures chaque jour dans le nord de la bande de Gaza, pour permettre aux civils palestiniens de quitter cette zone où les combats avec le Hamas font rage, sans perspective de cessez-le-feu.
"Un cessez-le-feu avec le Hamas signifie une reddition", a répété jeudi soir le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu sur la chaîne Fox News, réafirmant son objectif d'"éradiquer le Hamas" qui a déclenché la guerre en attaquant Israël le 7 octobre. "Rien ne nous arrêtera".
Israël a cependant accepté de faire des "pauses" humanitaires quotidiennes à partir de jeudi pour permettre aux civils de fuir le nord -où les combats et les bombardements se concentrent -vers le sud du territoire, selon les Etats-Unis.
Ces pauses "de quatre heures dans certaines zones du nord de la bande de Gaza, seront annoncées trois heures à l'avance", a précisé le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby, selon qui Washington a reçu l'assurance qu'"il n'y aurait pas d'opérations militaires dans ces zones pendant la durée de la pause".
"Pas d'eau, pas de boulangerie"
L'armée israélienne avait ouvert "un couloir d'évacuation" dimanche, mais des Palestiniens ont témoigné de combats persistants le long de cette route, empruntée par 100.000 personnes depuis mercredi, selon les chifres de l'armée israélienne et du Bureau de coordination des afaires humanitaires de l'ONU (OCHA).
La foule d'hommes et de femmes à pied, portant leurs enfants dans les bras, munis pour certains de quelques petits baluchons, a constaté un journaliste de l'AFP, vient grossir les centaines de milliers de réfugiés entassés dans le sud du petit territoire, dans des conditions désastreuses.
"On n'a pas d'eau, pas de toilettes, pas de boulangerie", dit Oum Alaa al-Hajin, qui a trouvé refuge dans l'hôpital al-Nasser, à Khan Younès, dans le sud, après des jours de marche. "On a une miche de pain tous les trois ou quatre jours, et il faut faire plusieurs heures de queue."
Selon l'OCHA, le nombre de déplacés à Gaza s'élève désormais à 1,6 million de personnes sur les 2,4 millions d'habitants de la bande de Gaza.
Dans le nord, où demeurent encore des centaines de milliers de personnes, "le manque de nourriture est de plus en plus préoccupant", s'inquiète l'ONU, selon qui aucune organisation n'a été en mesure d'y fournir une assistance depuis huit jours.
Les hôpitaux qui n'ont pas encore fermé manquent de médicaments et de carburant pour faire fonctionner les générateurs.
Ahmad Mhanna, médecin de l'hôpital Al-Awda de Jabaliya, décrit une situation "tragique". Dans la maternité, "les médecins utilisent des lampes frontales", tout comme au bloc opératoire, où les chirurgiens opèrent "sous anesthésie locale".
Selon le ministère de la Santé du Hamas, les abords et les sites de plusieurs hôpitaux du nord ont été pilonnés dans la nuit de jeudi à vendredi, dont celui de Chifa, où sont réfugiés 60.000 personnes, celui pour enfants al-Rantissi et l'hôpital indonésien. Le Hamas a fait état de blessés mais pas de personnes tuées.
Des images de l'AFTV montrent des bombardements massifs jeudi soir près de l'hôpital indonésien à Beit Lahia, qui ont provoqué la panique dans l'établissement.
Les troupes au sol israéliennes, appuyées par des bombardements, resserrent leur étau sur Gaza-ville qui abrite, selon l'armée, le "quartier militaire" du Hamas retranché dans un vaste réseau de tunnels.
Elle a affirmé jeudi avoir détruit des "entrées de tunnels, des ateliers de fabrication de missiles antichars et des sites de lancement de roquettes".
"Je pense que l'armée israélienne opère de manière exceptionnelle dans son combat contre les terroristes au sol et sous terre", a déclaré M. Netanyahu sur Fox News.
"Ni gouverner, ni occuper"
Selon la défense anti-aérienne israélienne, environ 9.500 roquettes ont été lancées vers Israël depuis le 7 octobre, la plupart interceptées. Mais leur nombre s'est "réduit de manière importante" depuis le 27 octobre et le début de ses opérations terrestres.
M. Netanyahu a répété jeudi soir qu'Israël ne cherchait pas à "gouverner ou occuper" Gaza, "mais nous cherchons à lui donner, ainsi qu'à nous, un avenir meilleur".
Alors que le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir une nouvelle fois à propos de Gaza vendredi, le patron de son agence pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) Philippe Lazzarini a afirmé jeudi que la situation s'apparente "plus qu'une crise humanitaire, (à) une crise de l'humanité", lors d'une conférence internationale organisée à Paris par le président français Emmanuel Macron.
Cette conférence a permis d'atteindre un milliard d'euros d'engagements, destiné à répondre notamment aux besoins de l'ONU pour aider la population des Territoires palestiniens.
Israël a cependant nié l'existence d'une "crise humanitaire", tout en reconnaissant les "nombreuses dificultés" auxquelles font face les civils palestiniens, dont le territoire est privé d'eau, d'électricité, de nourriture et de médicaments par le siège total imposé par Israël depuis le 9 octobre.
Selon l'OCHA, seulement 65 camions d'aide en provenance d'Egypte, via le passage de Rafah, y sont parvenus le 9 novembre, un volume "tout à fait insufisant".
Le terminal de Rafah a par ailleurs rouvert jeudi pour permettre l'évacuation d'étrangers, binationaux et blessés.
La guerre à Gaza a été déclenchée par l'attaque sanglante menée contre Israël le 7 octobre par le Hamas, classé organisation terroriste par Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne.
En Israël, au moins 1.400 personnes ont péri depuis le début de la guerre, selon les autorités, en majorité des civils tués le jour de l'attaque, d'une violence et d'une ampleur inédites depuis la création de l'Etat d'Israël en 1948. En outre, 239 personnes ont été enlevées et sont retenues à Gaza.
Dans la bande de Gaza, les bombardements israéliens ont fait 10.812 morts, essentiellement des civils, parmi lesquels 4.412 enfants, selon le ministère de la Santé du Hamas.
"On enterre les gens dans des terrains de football et les terrains vagues car les cimetières sont pleins. Les corps sont parfois transportés sur des charrettes faute de carburant pour faire fonctionner les voitures", se désole Shihteh Nasser, 48 ans.
Drone sur une école
Le conflit menace de s'étendre régionalement.
Israël a frappé en Syrie vendredi à l'aube en réponse à un drone qui s'est abattu jeudi sur une école à Eilat (sud), sans faire de victime, a indiqué l'armée israélienne.
L'armée a également indiqué "poursuivre ses opérations pour détruire les infrastructures" du mouvement pro-iranien Hezbollah au Liban, avec lequel les échanges de tirs sont quotidiens.
En soirée, l'armée israélienne avait également annoncé avoir intercepté un missile provenant de "la région de la mer Rouge" avec le système de défense anti-missile Arrow 3.
En Cisjordanie occupée, où les violences se multiplient, 18 Palestiniens ont été tués jeudi dans plusieurs localités, dont 14 lors d'un raid israélien dans la ville de Jénine, bastion des groupes armés, d'après le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne.
"C'est un scénario connu, cette vie est désolante", dit à l'AFP un ingénieur informatique qui refuse de donner son nom, alors que des coups de feu déclenchent la panique dans un groupe de badauds à Jénine.
Au moins 170 Palestiniens ont été tués par des tirs de soldats ou de colons israéliens en Cisjordanie depuis le 7 octobre, d'après l'Autorité palestinienne.
La Rédaction (avec AFP)