Samedi 11 septembre a eu lieu l’inauguration de l’espace Martin Luther King à Créteil. Un lieu innovant qui entend devenir un exemple de vivre ensemble et d’ouverture.
Original, unique, innovant. Ce sont les mots qui reviennent le plus lorsque l’on parle de l’espace Martin Luther King érigé à Créteil dans le Val-de-Marne, au sud de Paris.
Car l’espace MLK ce n’est pas seulement un palais des congrès comme les autres, ce n’est pas non plus une église comme certains pourraient avoir la tentation de le croire. Il s’agit d’un espace socioculturel propriété de la fondation du protestantisme basé sur un concept juridique innovant. Un espace que chacun peut louer chrétiens ou pas, et dont l’église Martin Luther King est locataire les weekends.
Un espace cadré par les lois de la République
Un projet « techniquement, juridiquement et financièrement très complexe » comme l’explique François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France (FPF), qui a pu être accompagné jusqu’à sa réalisation « grâce à la fondation du protestantisme et à ses compétences » ajoute-t-il saluant au passage le travail effectué par Anne Corvino, présidente de la fondation.
« Le projet que nous sommes en train de monter tient compte de la séparation de l’Etat » continue François Clavairoly qui précise qu’il s’agit d’une « solution cadrée par les lois de la République ».
« Depuis le début on s’est mis d’accord avec le ministère de l’Intérieur, ce ne sera pas un lieu qui cache du cultuel » souligne Ivan Carluer, pasteur de l’église MLK et l’homme à l’origine de ce projet lors de la conférence de presse.
Le résultat est un bijou de modernité et d’innovations technologiques. Un espace lumineux, composé d’un auditorium qui peut accueillir 1000 places assises avec un écran géant à 360°, un café, un restaurant, une crèche bilingue, un gymnase de plus de 600m2, des terrasses...
Mais ce qui rend ce projet d’autant plus original et unique c’est la façon dont Ivan Carluer a su rassembler et mobiliser les pouvoirs publics. Il lui aura fallu sept ans pour convaincre chacun. À commencer par le maire socialiste de la ville, Laurent Cathala. Dans son discours lors de l’inauguration, le maire a affirmé qu’il s’agissait d’un beau jour pour sa ville qui « voit son patrimoine s’enrichir d’un équipement remarquable ».
S’il confie avec humour ne jamais avoir eu l’ambition de devenir un bâtisseur de cathédrale, il rappelle que « la diversité des origines, la diversité culturelle, philosophique, religieuse » sont des richesses qu’il revendique. Car, affirme-t-il, « elles sont le moteur d’une dynamique locale faite de dialogue, de partage, de solidarité ».
Ainsi la Mairie, le Département, la Région, l’Etat et l’Union européenne ont tous participé financièrement à la construction de l’espace MLK dont le coût total est de 18 millions d’euros, auxquels il faut ajouter 4 millions d’euros d’équipement.
Construire une auberge plutôt qu’un temple
« Vos rêves ont leurs espaces ». Ce sont les mots que l’on peut lire dans le hall du bâtiment.
Car cet espace, c’est d’abord un rêve, celui d’Ivan Carluer. Le pasteur, ancien professeur d’économie âgé de 41 ans, confie dans son discours inaugural qu’il avait d’abord eu pour projet de construire un temple.
Inspiré par la parabole du Bon samaritain, il a réalisé qu’il lui fallait construire une auberge. Un lieu pour prendre soin des autres, un lieu pour inviter chacun à rejoindre la table de la fraternité.
« Là où celui qui voulait construire un temple voulait changer les gens sans aimer personne, c’est moi qui ai été transformé; mes vallées ont été remontés et un chemin vers la table de la fraternité a pu être créé. »
« C’est votre lieu autant que le mien, c’est un lieu pour une famille qui est l’humanité. » conclut le pasteur.
Des propos qui font écho à ceux de François Clavairoly qui définit l’espace MLK comme un « témoignage architectural et symbolique de la vie en commun, de la diversité acceptée, de l’altérité accueillie à l’image de ce qu’est l’assemblée des croyants, jamais un cercle fermé mais sans cesse renouvelé par ceux qui le rejoignent ».
L’héritage de Martin Luther King
Les discours des politiques et des représentants du protestantisme ont été entrecoupés d’un spectacle d’une grande qualité. Des chants, des danses, une scénographie époustouflante ont rythmé l’événement pour le plus grand plaisir des invités. Parmi les temps forts de cette matinée, un duplex en direct d’Atlanta aux États-Unis avec Bernice King, fille du pasteur et défenseur des droits civiques Martin Luther King qui a donné son nom à ce nouveau lieu.
Un nom qui porte un message fort. Un message de fraternité, d’ouverture, de combat contre la haine et l’exclusion, comme l’a souligné le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, dans une allocution enregistrée pour l’inauguration.
« Je veux aussi dire que le nom de Martin Luther King est évidement attaché à ce soucis de fraternité et je veux retenir que lui même écrivait que toute séparation ethnique, culturelle, était un pêché. Et c’est contre ce péché que les protestants de France militent, et c’est contre ce pêché, si j’ose dire, que la République française avec eux milite. »
Un message d’autant plus marquant en ce 11 septembre 2021, vingt ans après les attentats de 2001 qui ont boulversé le monde.
Vingt ans plus tard, l’espace MLK entend témoigner du fait que la liberté et la fraternité sont toujours debout et que le vivre-ensemble n’a pas peur d’oser rêver un lieu tel que celui-ci.
Camille Westphal Perrier