François Fillon défend les chrétiens d’Orient devant le Sénat : « Leur sort est le prélude à notre propre sort »

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« Non seulement la situation du Moyen Orient ne s’est pas améliorée depuis 30 ans, mais les raisons d’espérer se sont réduites d’années en années. [...] Et les chrétiens d’Orient constituent le triste baromètre de cette dégradation continue de la situation. Ils payent lourdement chaque crise, chaque soubresaut de ce Moyen Orient entré dans une éruption dont on ne voit plus l’issue. »

François Fillon était présent au Sénat hier. Il s’est exprimé lors du colloque sur la protection des minorités religieuses au Proche-Orient, sur le sort des chrétiens d’Orient. Il a souhaité ainsi « participer à la prise de conscience en Europe et au Moyen Orient de l’enjeu du maintien des chrétiens chez eux », « créer une force de pression sur les gouvernements européens pour les rappeler à leurs responsabilités » et « être les porte-voix du travail humanitaire exemplaire » sur place.

Il a commencé par rappeler sa « bataille frontale contre le totalitarisme islamique », « idéologie qui a pour mot d’ordre la soumission ou la disparition ». Pour lui, « l’avenir de l’Occident et l’avenir de l’Orient sont intimement liés », et « le sort des chrétiens d’Orient et des autres minorités est en réalité le prélude à notre propre sort ». Or, il l’affirme, les chrétiens d’Orient sont « les oubliés de l’histoire ».

Après avoir quitté « la scène politique », François Fillon veut désormais « être utile autrement », notamment en prenant la défense des chrétiens d’Orient.

« Pourquoi la cause des chrétiens d’Orient m’a touché ? D’abord parce que c’est une cause qui est depuis très longtemps sans défenseur. On ne le dira jamais assez. Les États européens et leurs élites ont été silencieux et lâches devant la disparition progressive d’une des plus vieilles et des plus brillantes communautés du Moyen Orient. Pourquoi encore cette cause ? Parce que je suis convaincu que le recul de l’intégrisme et la paix pour tous passent par la liberté de croire et par la liberté de conscience. »

Pour François Fillon, « le destin des chrétiens d’Orient est symbolique et décisif ».

« Si cette communauté désarmée, petite en nombre, mais si majestueuse par sa culture devait être définitivement condamnée à la relégation ou au départ, alors ça serait l’espoir de la coexistence et de la liberté sous toutes ses formes qui serrait saccagé. Et, par ricochet, les ponts déjà très fragiles entre l’Orient et l’Occident, qui seraient rompus. ».

Devant « le calvaire des chrétiens d’Orient », il ressent « remords » et « colère », « face aux erreurs politiques et militaires commises par nos nations ».

« En Afghanistan, on a chassé les soviétiques en réveillant le djihad. En Arabie Saoudite, le commerce du pétrole a commandé notre silence sur l’influence grandissante du wahhabisme. En Irak, on chassa une dictature en faisant une place nette non pas aux démocrates, mais à un califat moyenâgeux. En Syrie, faute de stratégie et de réalisme, on laissa aux Russes et aux Iraniens le pouvoir de dicter l’avenir de toute la région. »

Pour lui, les chrétiens d’Orient vivent « au milieu de toutes ces erreurs ». Il l’affirme, « les chrétiens d’Orient vivent en réprouvés, en humiliés depuis des décennies », tout comme d’autres minorités, comme les yézidis, les mandéens, les shabaks...

« Et au milieu de toutes ces erreurs, au coeur de tous ces orages, les chrétiens d’Orient furent les otages et parfois les complices obligés des régimes les plus durs, puis les victimes des islamistes qui leur promettaient le cercueil ou la valise. Ce n’est pas parce que l’État Islamique est en voie d’être abattu que tout est réglé. Le venin du fondamentalisme agit toujours, et rappelons-le, l’intolérance n’est pas née avec Daech, même si l’oppression fut plus sanguinaire que jamais. »

Après s’être rendu des années durant auprès des chrétiens d’Orient, il en est arrivé à un « constat dramatique ».

« Non seulement la situation du Moyen Orient ne s’est pas améliorée depuis 30 ans, mais les raisons d’espérer se sont réduites d’années en années. [...] Et les chrétiens d’Orient constituent le triste baromètre de cette dégradation continue de la situation. Ils payent lourdement chaque crise, chaque soubresaut de ce Moyen Orient entré dans une éruption dont on ne voit plus l’issue. [...] Aujourd’hui, les chrétiens d’Orient ne sont en sécurité nulle part, à l’exception de la Jordanie, d’Israël et du Liban. [...] En Arabie Saoudite, au Qatar, ou au Koweit, les chrétiens ne sont pas des citoyens à part entière. En Turquie, les congrégations religieuses se voient dépossédées progressivement de leur bien et avec eux de faire vivre leur foi dans cette grande nation qui ambitionne pourtant de rejoindre l’Union Européenne. »

Pour lui, les fondamentalistes imposent la question religieuse dans la sphère politique. Pourtant, il remarque dans ses sociétés « une soif d’amitié », avec des personnes qui recherchent la « concorde ».

« Et je le dis ici, la foi n’est pas l’adversaire de la paix. C’est la foi intransigeante, politisée qui est l’adversaire de la paix. »

Il estime que le sort des chrétiens d’Orient n’a jamais été une priorité pour l’Europe, « d’abord parce qu’ils sont trop minoritaires, ensuite parce que la dépendance énergétique de l’Europe lui imposait de protéger ses sources d’approvisionnement, parce que l’Europe a mauvaise conscience en raison de sa lourde responsabilité dans les conflits qui ravagent le Moyen Orient depuis la fin de la seconde guerre mondiale, par ignorance, aussi ».

« Combien de fois, j’ai entendu des commentateurs parler des chrétiens d’Orient comme s’ils étaient des descendants des croisés, des colonisateurs venus d’Occident. Alors qu’ils étaient en Égypte, en Syrie et en Irak avant que l’islam ne s’y établisse. Pourtant, ce n’est pas tant parce qu’ils sont chrétiens que l’Europe doit les défendre. Mais, c’est parce qu’ils sont persécutés et que leur éviction du Moyen Orient pourrait bien participer au déclenchement d’un conflit de civilisation que les fondamentalistes islamistes font tout pour provoquer. »

Pour François Fillon, les chrétiens d’Orient sont « les boucs-émissaires d’une radicalisation de l’islam, instrumentalisée par ceux qui veulent imposer par la force, par la violence, un régime politique qui n’a rien à voir, ni rien à faire avec la religion, mais tout à voir avec la conquête du pouvoir et l’assouvissement des pires instincts humains ».

Pour lui, ce n’est pas « un rêve ». C’est « un projet ». Son association va commencer cette année à soutenir des projets humanitaires, comme le financement d’un collège ouvert à toutes les confessions à Qaraqosh, le soutien du retour des familles chrétiennes à Alep, le financement de bourses pour des étudiants chrétiens et yézidis afin qu’ils puissent terminer leurs études à l’université de Mossoul.

M.C.

Crédit Image : Mathis Boussuge / Shutterstock.com

 

 


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