L’église évangélique arménienne d’Alfortville (région parisienne) a été la cible d’un incendie criminel le dimanche 2 avril au matin, tirant du lit le pasteur Gilbert Léonian et son épouse Léa, logeant à l’étage et réveillés par la lumière des flammes qui commençaient à atteindre la fenêtre de leur chambre.
L‘incendie n’a pas fait de victime, mais a sérieusement endommagé la façade. Quatre heures plus tard, le culte était maintenu : « Nous ne voulons pas laisser l’occasion à l’ennemi de nous remplir de peur » affirme le pasteur. Cet incendie intervient une semaine après d’autres dégradations, notamment des jets de pierre qui avaient détérioré les vitres et la façade de la même église.
Cette petite assemblée de 30 personnes est installée là depuis plus de 50 ans. Jamais auparavant, elle n’avait été l’objet de menaces particulières. Membre de l’Union des Eglises Evangéliques Arméniennes de France, elle-même membre du CNEF (Conseil National des Evangéliques de France), de la FPF (Fédération Protestante de France), et du Conseil Mondial Évangélique Arménien, cette église n’est ni souterraine, ni polémique. Elle s’inscrit dans le paysage de sa commune aux côté d’une synagogue, une mosquée, une église apostolique arménienne, trois églises catholiques et trois autres églises évangéliques. Ces lieux de culte se connaissent, se respectent, vivent paisiblement les uns auprès des autres. Il ne semble pas que d’autres actes de cette ampleur aient jamais eu lieu à Alfortville, ni contre l’église évangélique arménienne, ni contre aucun des autres lieux de culte. Une cérémonie d’apaisement commune avait même été organisée suite aux attentats du 13 novembre 2015 à Paris et St-Denis.
Le pasteur rappelle :
« Mais il faut que les autorités réalisent que ce qui nous est arrivé n’est pas anodin et peut arriver ailleurs, on doit être vigilant et y réfléchir sérieusement ! »
Ces appels à l’amour et à la confiance ont-ils commencé à troubler certains voisins ?Il est vrai que, depuis deux ans, la petite assemblée est plus visible dans le paysage local : des soirées-événements y sont organisées, un stand biblique est tenu régulièrement, avec distribution d’évangiles en français, arménien, turc, arabe. Un panneau portant l’inscription « Confiance, Dieu t’aime » en 8 langues avait été apposé devant le lieu de culte. Ces appels à l’amour et à la confiance ont-ils commencé à troubler certains voisins ? Faut-il confiner l’expression de la foi à l’intérieur des murs de l’église ? Le pasteur Léonian s’y refuse ! Le feu a été rapidement maîtrisé, mais celui qui brûle au cœur des fidèles n’en a été que ravivé !
Des messages de soutien affluent du monde entierQuelques jours auparavant, l’église recevait le Pasteur Norek Hovsepian, venu de Bagdad (Irak) informer le public de France sur la situation des Chrétiens dans la tourmente de la persécution. Lui qui la connaît de près était estomaqué de voir de ses yeux les premiers actes de vandalisme du 27 mars. L’affiche annonçant l’intervention du pasteur d’Irak, réalisée par le Pasteur Léonian lui-même, présentait la photo… d’un bâtiment en flammes. Des messages de soutien affluent du monde entier, notamment de lieux où la persécution fait ou a fait rage : Liban, Irak, Iran, Syrie, …
Vérité, justice, réconciliationLa date de l’incendie a également une résonnance particulière en cette période où s’ouvre le chemin de Pâques, et à 3 semaines des commémorations du génocide arménien auxquelles l’église participera comme chaque année. Paisiblement mais fermement, elle agit pour que l’histoire ne soit pas oubliée et que les descendants des bourreaux et des victimes puissent chacun voir cicatriser cette plaie dans leur histoire blessée. Vérité, justice, réconciliation : tels sont les ingrédients d’une recette qui se veut porteuse de paix pour l’avenir.
Cet acte criminel intervient également trois jours après la diffusion sur la chaîne France Ô d’un reportage caricatural voire mensonger sur les Évangéliques en France. Toutes ces circonstances ont-elles eu un effet catalyseur ? L’enquête tentera de le déterminer.
Une chose est certaine : cet incendie volontaire n’affaiblira pas la volonté du pasteur Gilbert Léonian de continuer à poursuivre son action dans la cité.
« Nous sommes plus motivés que jamais pour témoigner de l’Evangile, vivre le Christ et le faire connaître avec notre foi, nos racines, nos valeurs. Nous avons besoin de la prière des frères et sœurs, et de voir la protection de Dieu. »
Crédit image : Eglise Evangélique Arménienne