Le temps, la distance, les choix de vie: autant de raisons qui desserrent des liens d’amitié et poussent à se demander s’ils ont fait leur temps. L’amitié demande de l’entretien et un terreau commun minimum pour continuer de croître.
Qu’est-ce qui peut mettre fin à une amitié ? Le manque de réciprocité, avancent plusieurs femmes interrogées.
« Quand j’ai déménagé, j’ai eu beaucoup de peine à garder le contact. Je n’avais pas de réponse à mes courriels et invitations. Cela ne sert pas à grand-chose de garder une amitié à sens unique », raconte Cléa, vingt-cinq ans.
La plupart du temps, reconnaît chacune, il n’y a pas de mauvaise intention derrière. Les tentatives de fixer des rendez-vous sont infructueuses et l’amitié prend petit à petit fin. Les circonstances de vie sont souvent en cause. Pour Sandrine, trentenaire, c’est chez sa voisine et amie que le manque de réciprocité est ressenti.
Suite à la reprise de travail de Sandrine, les reproches commencent à tomber.
« Elle trouvait que je ne lui consacrais plus assez de temps et que je n’en faisais plus assez pour elle en échange. »
Se détacher pour se protéger
Mais parfois, la prise de distance relève davantage du choix. La voisine de Sandrine lui envoie des courriels blessants. Isabelle, la cinquantaine, est également heurtée par des remarques récurrentes de l’une de ses amies. Toutes les deux décident de prendre leur distance: « Pour se protéger », explique Sandrine.
Cléa, quant à elle, raconte qu’une amitié avait une mauvaise influence sur elle :
« J’étais très différente en étant avec cette personne, moqueuse et méchante. J’ai arrêté de la voir après m’être remise en question et quelques remarques. Cela ne valait vraiment pas le coup. »
Pour d’autres femmes, c’est pour protéger autrui qu’une amitié a carrément été coupée. « J’ai déjà renoncé à une amitié pour mon couple », explique Mélanie. « Je ne voulais pas entretenir une relation fille-gars privilégiée ». Débora a vu l’un de ses meilleurs amis couper les ponts parce qu’il avait développé des sentiments qui n’étaient pas réciproques.
Quand un désaccord rend le partage impossible
Les divergences d’intérêt ou d’opinion peuvent également créer l’écart. Anne-Marie, jeune arrière-grand-mère, se souvient d’une personne accueillie dans son foyer. Petit à petit, les choix de vie de cette dernière « ne cadraient plus avec le témoignage chrétien qu’elle avait eu ».
Elle savait que nous ne pouvions pas l’approuver mais ne voulait pas en discuter. Aujourd’hui, il y a toujours un téléphone annuel, mais « l’échange est tout à fait superficiel », regrette Anne-Marie.
Pour Olivia, son mariage a été la cause d’un conflit avec sa meilleure amie, qui n’accepte pas son mari. « On n’a presque pas parlé depuis », confie la jeune femme.
« Cela me fait toujours très mal. »
Comment réagir ?
Quand on veut se défaire d’une amitié, faut-il la laisser faner? La plupart du temps, cela se passe de manière progressive. « Les contacts se sont naturellement espacés », confirme Françoise, la cinquantaine, en repensant aux amitiés passées.
Que la prise de distance soit volontaire ou non, la manière douce est en général choisie. « Je n’ai plus proposé de revoir cette amie qui avait une mauvaise influence et ai décliné ses invitations », note Cléa. « Aurais-je dû être plus franche? », se demande-t-elle.
Une discussion «cartes sur table» est délicate. Mélanie a écrit une lettre.
« Nous avons éclairci les choses, disant que ce n’était pas une discorde mais que simplement nos chemins se séparaient par la force des choses. Cela m’a fait du bien d’officialiser les choses, mais aujourd’hui quand on se recroise, c’est quand même bizarre! »
Au vu des expériences des unes et des autres, l’amitié demande de l’entretien, ainsi qu’une définition plus ou moins commune. « Je distingue les amies et les connaissances. J’entretiens les premières », raconte Olivia. Il y a en effet des amitiés d’une qualité particulière qui résistent au temps et à la distance, confirment plusieurs femmes.
« Il m’est arrivé de renouer une amitié après un temps de silence de plusieurs années; et cela s’est vécu tout aussi naturellement et avec la même intensité », raconte Françoise.
C’est la raison pour laquelle plusieurs femmes préfèrent ne pas parler de rupture. Une mise à distance, oui, une coupure définitive, non.
« L’amitié a été comparée à un réseau de chemins: parfois on fait un long bout de route ensemble, parfois il est des carrefours où nos chemins se séparent, pour se recroiser un jour, peut-être », conclut Françoise.
N. Horton
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Article initialement publié en octobre 2021