En Inde, la violence contre les femmes commence dans l’utérus

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Depuis 25 ans, Sabu George étudie à Dehli ce qu’il nomme « La pire forme de violence » de l’histoire indienne : l’élimination de millions de filles à naître.

Le chercheur considère qu’il ne s’agit de rien de moins qu’un génocide et décrit les premiers mois dans l’utérus comme « la partie la plus risquée du cycle de vie d’une femme en Inde ». Au cours des deux dernières décennies plusieurs rapports ont régulièrement mis en lumière l’ampleur du phénomène. Dans un article du Guardian, les journalistes Raekha Prasad et Randeep Ramesh décrivent l’horreur.

« Des restes de dizaines de bébés ont été exhumés au Punjab. Pour se débarrasser des preuves, l’acide a été utilisé pour faire fondre la chair, puis les os ont été martelés... »

Selon une étude du Lancet, 10 millions de filles auraient été avortées en vingt ans.

Et le chiffre pourrait plus que doubler s’il on prend en compte l’infanticide après la naissance.

« Cette perte n’est pas due à l’avortement. Les bébés filles qui ne sont pas victimes de la sélection prénatale et de l’élimination ne sont pas garanties de survivre après la naissance. »

D’autres sont abandonnées, à la sortie d’un poste de police, dans les toilettes d’une gare, sur un marché, dans un recoin d’une gare routière, ou pour les plus chanceuses, dans une alcôve spécialement installée à l’entrée d’un orphelinat, dont l’alarme se déclenche quand un berceau y est déposé.

« Presque toujours, ce sont les filles qui restent dans le berceau. »

Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’avortement et l’abandon des petites filles ne sont pas uniquement la conséquence de la pauvreté. De plus en plus de familles aisées y auraient recours. En effet, les parents éduqués planifient leur famille et ont recours aux cliniques, radiologues et médecins pour identifier le sexe de leur enfant. Les beaux-parents influents font pression sur leurs belles-filles pour qu’elles donnent naissance à des fils. Une enquête aurait même révélé que le fœticide féminin est plus élevé chez les femmes titulaires d’un diplôme universitaire.

Et cette violence dans les premiers stades de vie engendre un autre type de violence.

En raison de la disparition de filles en Inde, une grande cohorte d’hommes ne peut pas se marier et, à mesure que les potentielles épouses se font rares, la traite des femmes et des filles augmente. Un rapport de Reuters de 2017 révèle une augmentation annuelle de 25% de femmes et d’enfants victimes de la traite en Inde.

Pour KS Jacob, professeur en psychiatrie au Christian Medical College de Vellore, en Inde, « le foeticide féminin et l’infanticide ne sont que la pointe de l’iceberg ». En d’autres termes, la violence commence dans l’utérus mais continue à l’âge adulte et façonnerait en profondeur la culture indienne.

H.L.


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