
Le président argentin Javier Milei a participé à l’inauguration du Portal del Cielo, une nouvelle église évangélique de 10 000 places située dans le Chaco. Cet événement historique a été salué par certains, mais le discours du président a suscité de vives critiques au sein même des milieux évangéliques.
C’est un événement inédit dans l’histoire récente de l’Argentine : samedi 6 juillet, le président Javier Milei a participé à l’inauguration du Portal del Cielo (la Porte du Ciel), gigantesque auditorium évangélique de plus de 10 000 places, présenté comme le plus grand du pays. Situé à Resistencia, dans la province du Chaco, ce lieu de culte est l’œuvre de l’Église chrétienne internationale fondée en 1994 par les pasteurs Jorge et Alicia Ledesma, souligne Evangelical Focus.
La construction a duré plus de dix ans, entièrement financée en espèces selon ses fondateurs, en réponse à une "prophétie reçue il y a 17 ans". L’inauguration s’est tenue lors d’un congrès international rassemblant différents leaders chrétiens.
Mais c’est surtout la présence et le discours du président Milei qui ont provoqué des remous. Premier chef d’État argentin à prendre la parole dans une église évangélique, il y a dénoncé la "religion de l’État", défendu les valeurs "judéo-chrétiennes de liberté" et critiqué la justice sociale comme une "anti-valeur de gauche".
"La justice sociale, par essence, consiste à voler le fruit du travail d'une personne pour le donner à une autre. En d'autres termes, il s'agit d'une charité imposée par la force, et la charité ne peut se faire sous la menace d'une arme", a-t-il lancé, selon l’agence SIR.
Des paroles jugées problématiques par de nombreux responsables évangéliques. Le pasteur Norberto Saracco a regretté que la chaire ait été utilisée à des fins politiques, dénonçant "une diatribe contraire à l’Évangile". D’autres, comme Walter Ghione, ont rappelé que l’État est voulu par Dieu selon les Écritures, et que la justice sociale puise dans l’héritage chrétien. Selon Jorge Fernández, évangélique argentin établi en Espagne, "l’Église ne doit pas servir de tribune au pouvoir politique, quel qu’il soit".
Ce débat illustre les tensions croissantes entre foi et politique en Amérique latine, une région du monde où les Églises évangéliques sont en pleine expansion.
Germain Gratien