Découvrez le livre : « Jérusalem. Histoire d’une ville monde »

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L’actualité récente a été marquée par une importante polémique autour d’une décision de l’UNESCO touchant Jérusalem. Face à cela, ce livre nous offre justement l’occasion de prendre un peu de recul pour se plonger dans l’histoire « longue durée », puisqu’il retrace l’histoire de Jérusalem, depuis les origines jusqu’à nos jours.

Comme l’indique le petit encart rouge en haut de la couverture, ce travail est « inédit ». Il n’existe en effet, en anglais ou en français, aucune histoire complète de Jérusalem. Un tel manque pourrait nous étonner, et je m’étais d’ailleurs fait cette réflexion au début de l’été, avant d’être informé de la parution de l’ouvrage. Toutefois, cela peut s’expliquer par l’ampleur même de la tâche et des compétences requises pour mener à bien ce travail.

C’est pour cette raison que ce livre n’est pas dû à un seul homme, mais il est le fruit de la collaboration de quatre historiens : Katell Berthelot, Julien Loiseau, Yann Potin et Vincent Lémire, aux compétences complémentaires, allant de l’histoire ancienne à l’histoire contemporaine, en passant par l’islam médiéval. Le livre lui-même suit un plan chronologique en sept chapitres, des origines (4000 av. J.-C.) jusqu’à nos jours.

Le premier chapitre couvre la période la plus étendue, puisqu’il part de -4000 jusqu’au deuxième siècle après Jésus-Christ.  C’est à la fin du quatrième millénaire que nous trouvons les premières traces d’habitation. Au 19e siècle, nous retrouvons la plus ancienne trace du nom de Jérusalem avec les consonnes : R-Sh-L-M-M, que l’on prononçait probablement « Rushalimum ».  Un siècle plus tard, les découvertes archéologiques montrent que cette période marque aussi un développement important pour la ville. C’était l’époque où Melchisédeq (Gn 14 : 18) régnait sur la ville.  Par la suite, la ville connait une phase importante de déclin.

Le plus ancien document écrit découvert à Jérusalem est une tablette d’argile du 14e siècle écrite en akkadien. Elément intéressant, l’archéologie a permis de mettre à jour la correspondance entre le roi de l’époque et le souverain d’Egypte, preuve que l’écriture était déjà bien diffusée dans la région, ce qui est bien sûr important pour l’histoire de la rédaction de la Bible.
Tout ceci pose aussi la question de l’origine de la ville

Tout ceci pose aussi la question de l’origine de la ville. Il est fort probable que les premiers habitants étaient Hittites. On trouve un écho de cela dans les paroles du prophète Ezéchiel (16 : 3 ou 45).

Après la conquête israélite, la ville est devenue sous la monarchie la capitale d’un royaume et on arrive à l’histoire bien connue des lecteurs de la Bible. La ville subit ensuite plusieurs pouvoirs étrangers : babylonien, perse et grec, avant de retrouver son indépendance au 2e siècle av. J-C., grâce au succès de la révolte des Maccabées. Ceux-ci établissent un royaume indépendant dirigé par les Hasmonéens.

Mais cette indépendance est de courte durée, quelques décennies seulement, puisque Jérusalem tombe ensuite sous le joug romain qui installe une dynastie vassale : les Hérodiens. C’est dans ce contexte que naît Jésus. Une génération après la mort de Jésus, la ville est assiégée par les Romains et le Temple détruit, ce qui constitue une nouvelle rupture.

Une deuxième révolte a lieu soixante plus tard et la ville change de nom pour devenir Aelia Capitolina. Pendant plusieurs siècles, le passé judéen semble complètement disparaître.Cette révolte marque un tournant et a donc été choisi comme commencement du deuxième chapitre. C’est à cette époque que le christianisme progresse au sein de l’empire romain et Jérusalem suit le mouvement. La géographie et les lieux se christianisent progressivement.
Mais au VIIe siècle, une nouvelle rupture intervient puisque Jérusalem sort de l’empire romain

Mais au VIIe siècle, une nouvelle rupture intervient puisque Jérusalem sort de l’empire romain. D’abord par une conquête très brève des Perses, mais surtout par sa perte (presque) définitive au profit de l’empire musulman. Cependant, la conquête militaire n’aboutit pas à une transformation immédiate de Jérusalem et pendant plusieurs siècles celle-ci est encore majoritairement occupée par les chrétiens.

Le quatrième chapitre est consacré à une période très délimitée, de moins d’un siècle (1099 à 1187) où Jérusalem est aux mains des Francs. Vous pourrez y goûter un peu de français de l’époque à travers quelques extraits d’un guide pour pèlerin :

« Li Porte Davi est viers solail couçant (…). Celle porte tient à la tor Davi, por ce l’apelle on la porte Davi. Quant on est dedens celle porte, si torne on à main dextre en une rue par devant le tour Davi ; si puet on aler in monte Syon ; car celle rue va à le rue de Monte Syon, par une posterne qui là est. »

Ce royaume, trop isolé, disparait lors de la reconquête menée par Saladin

Ce royaume, trop isolé, disparait lors de la reconquête menée par Saladin. Cette prise par Saladin s’accompagne cette fois-ci d’une islamisation plus poussée qui se poursuit jusqu’à Soliman et qui nous est relatée tout au long du cinquième chapitre.Le sixième chapitre traite de la période ottomane. Sous les Ottomans, Jérusalem, malgré son statut particulier, n’a plus la même importance mais vit une vie paisible. Les juifs et les chrétiens sont devenus minoritaires et la ville a maintenant les contours que l’on connaît aujourd’hui.

Enfin, le septième et dernier chapitre nous raconte l’histoire de Jérusalem au XXe siècle. Un changement majeur se produit au début du siècle, avec l’arrivée des Britanniques au cours de la Première Guerre mondiale. L’Empire ottoman, battu, disparaît et de nouveaux horizons s’ouvrent.Après la Seconde Guerre mondiale, Jérusalem redevient la capitale d’un Etat indépendant, plus de 2000 ans après la chute du royaume hasmonéen.Cette histoire est bien sûr loin d’être finie et l’actualité nous rappelle tous les jours à quel point les choses sont compliquées.

En conclusion, on peut dire que ce livre constitue une excellente introduction à l’histoire de Jérusalem. Si on pourra toujours discuter certains choix et certaines prises de positions, on ne peut que saluer le résultat d’ensemble.

Evoquons pour terminer deux atouts supplémentaires : un format de poche qui facilite son transport et un prix extrêmement attractif, puisque ces 500 pages ne coûtent que 12 euros.

Vincent Lemire (dir), Jérusalem. Histoire d’une ville-monde des origines à nos jours, Flammarion, 2016.


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