Le CNEF et la Fédération Protestante de France ont livré leurs avis dans deux rapports lors des États généraux de la bioéthique.
Aujourd’hui, les débats au sujet de la révision de la loi bioéthique commencent à l’Assemblée Nationale. Un des sujets phares, l’élargissement de la PMA aux couples de femmes et aux femmes célibataires, pose des problématiques éthiques cruciales. La Fédération Protestante de France (FPF) et le Conseil National des Évangéliques de France (CNEF) ont publié chacun un texte pour faire état de leurs positions sur l’assistance médicale à la procréation.
La Commission Éthique et société de la Fédération Protestante de France a émis des « interpellations protestantes » et les a présentées au Conseil consultatif national d’Éthique dans le cadre des états généraux de la bioéthique. Le texte commence par rappeler que « la vie est un don de Dieu, que l’être humain est un être en relation, qu’il faut se soucier de la protection des plus faibles et ne jamais oublier la justice sociale ». Les rédacteurs soutiennent l’avis que « le possible n’est pas forcément le souhaitable et [qu’]il n’est pas forcément légitime de répondre à tous les désirs« .
« À la lumière du témoignage biblique et de ses reprises au moment de la Réforme, nous affirmons que la liberté ne se confond ni avec l’individualisme sans limites, ni avec la loi de l’offre et de la demande qui aboutit à la loi du plus fort. La liberté ne peut se vivre que dans l’amour de Dieu et du prochain. »
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La FPF rappelle ensuite que « les enfants sont une grâce de Dieu faite au couple et non un dû » et précise qu' »il est important d’évaluer les techniques de procréation et leur emploi à la lumière de leur capacité à préserver ou non le respect des liens humains de couple et de filiation qui nous tissent ».
Si la commission salue « les avancées de la médecine pour traiter l’infertilité » et ne rejette pas « les techniques qui permettent ces avancées », elle se dit interpelée par plusieurs faits, comme le faible taux de réussite des FIV, leurs effets secondaires, la question de la « congélation sociale », les conséquences sur le bien-être des enfants, les diagnostics pré-implantatoires, « pente glissante vers l’eugénisme« , la pénurie de dons de gamètes et la gestion de la « tension entre le principe de l’anonymat des donneurs et le droit de l’enfant à connaître ses parents biologiques ».
Face à ces constats, la FPF se dit « réticente à l’ouverture de l’insémination artificielle à des femmes célibataires ou à des couples de femmes qui ne sont pas infertiles » et contre « la GPA parce qu’elle paraît nier le lien biologique entre la mère gestatrice et l’enfant, parce qu’elle risque de développer la commercialisation de la reproduction et d’exploiter les femmes donneuses d’ovules ou mères de substitution, parce qu’elle mettrait les enfants dans une situation ambiguë ».
La Commission d’éthique protestante évangélique, comité éthique du CNEF, a elle aussi apporté ce qu’elle appelle une « contribution évangélique aux États généraux de la bioéthique ». Si ses membres précisent d’emblée que « le mariage ne crée pas un droit à l’enfant », ils ajoutent qu’ils « ne s’opposent pas à l’AMP tant qu’elle reste une aide médicale visant à rétablir la fécondité d’un couple stable homme et femme avec leurs propres gamètes et respecte le caractère humain de leurs embryons ». Ils pointent néanmoins la problématique des embryons surnuméraires.
« [Les protestants évangéliques] souhaitent cependant que tout soit mis en œuvre pour éviter la création d’embryons ‘surnuméraires’ et demandent à ce que ces techniques ne brisent pas les liens humains et le principe de responsabilité envers les générations futures. »
Ils se disent également « opposés à la fabrication d’enfants pour répondre aux aspirations d’adultes qui n’offrent pas ce cadre naturel ». Le comité s’oppose à la prise en charge financière de ces « désirs d’enfants ». Il déplore que la procréation médicale assistée passe du « soin » à la « médecine du désir ».
« [Les protestants évangéliques] considèrent que l’État n’a pas à prendre en charge, y compris financièrement, tous les désirs d’enfants, d’autant plus quand ils vont contre l’intérêt de l’enfant et de la société en privant volontairement des enfants de père. »
Selon le CNEF, « ni les lobbies, ni les experts ni l’absence de fondement moral commun dans une société pluraliste et individualiste ne devraient abolir notre conscience morale, nous faire renoncer à rechercher le bien commun et une justice qui protège le faible de la loi du plus fort. »
Le comité d’éthique déplore également la « pression sociale sur les femmes ».
« L’allongement du temps d’étude et l’incompatibilité sociale entre maternité et carrière professionnelle, provoquent un retard de l’âge auxquelles beaucoup de femmes sont prêtes pour la maternité. Or l’horloge biologique, elle, ne s’arrête pas et la fécondité baisse avec l’âge. De grandes entreprises aux USA encouragent déjà leurs employées à congeler leurs ovocytes, leur faisant miroiter la promesse trompeuse d’une fertilité juste reportée. Trompeuse car cela ne veut pas dire que ces femmes auront des enfants au bout du compte. »
Il s’inquiète ensuite des « dérives marchandes » et de « pas supplémentaire » vers la GPA en France. Pour ses experts, « il n’y a pas de GPA éthique » puisqu’elle repose sur la « marchandisation du corps humain, la commercialisation du vivant, l’exploitation de la pauvreté, un véritable esclavagisme moderne ».
« Ils estiment que ni des souffrances individuelles, ni le fait que la loi soit enfreinte ne justifient de supprimer l’encadrement légal actuel de l’AMP qui protège l’intérêt de l’enfant et cette procréation de dérives marchandes. Enfin ils considèrent que l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes est un pas supplémentaire qui conduira à accepter la pratique de la GPA en France. »
Si certains placent le tourisme procréatif comme argument favorable à élargissement de la PMA à toutes les femmes, le comité d’éthique refuse que « la fraude » rende la « loi inutile » et en appelle au maintien de l’interdiction.
« On a aussi évoqué le fait que la fraude rendrait la loi inutile. Cet argument n’est pas éthique ! Si l’on estime qu’il est juste d’interdire une pratique qui va contre l’intérêt de l’enfant et contre la marchandisation du corps humain (vente de gamètes et mères porteuses) alors il faut maintenir cette interdiction. »
Ainsi, « attachés au respect du mariage entre l’homme et la femme », la commission dénonce « comme illusoire, dangereuse et aliénante la foi moderne en une technique toute puissante pour réaliser tous nos désirs », elle affirme l’ « aspect déshumanisant » de la PMA « quand elle brise les liens naturels, affectifs, sociaux ou généalogiques qui unissent un enfant à ses parents » et rappelle que « la différence des sexes n’est pas une discrimination sociale ».
« Nous protestants évangéliques, nous sommes opposés à la fabrication d’enfants pour satisfaire des couples socialement stériles. »
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M.C.
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