Brassard en soutien aux homosexuels au Qatar : des sportifs chrétiens proposent des pistes de réflexion
La Coupe du monde de football en cours voit la rencontre d’une vision pénalisant durement l’homosexualité et celle de revendications LGBT auxquels les joueurs sont encouragés à faire une place. Au Qatar, les homosexuels encourent sept ans de prison, voire la peine capitale s’ils sont officiellement musulmans. Le port de signes aux couleurs LGBT par les spectateurs est un objet de tension entre la FIFA et l’émirat, mais aussi entre des sportifs et des lobbies et médias. Comment se positionner en tant que chrétiens ?
Hugo Lloris, capitaine de l’équipe de France, a décidé de ne pas arborer de brassard « One Love » pour soutenir les homosexuels persécutés, arguant qu’il respectait la culture qatarie comme il attendait que les étrangers respectent la française. Un choix conforme à celui de la FIFA qui a déclaré que, contrairement aux spectateurs, les joueurs ne peuvent afficher de messages politiques dans les stades.
Lloris affirme cependant soutenir les droits des personnes LGBT. Olivier Giroud, chrétien engagé, a déclaré en 2018 ne pas avoir hésité à porter les rainbow laces (des lacets aux couleurs LGBT) à Arsenal et a rappelé qu’il avait posé en une du magazine homosexuel, Têtu. Il explique son choix par l’invisibilité imposée aux footballeurs homosexuels :
« Dans un vestiaire, il y a beaucoup de testostérone, de chambrage, les douches collectives… C’est délicat, mais c’est comme ça. Je comprends la douleur et la difficulté des gars à faire leur coming out, c’est une vraie épreuve après un travail sur soi pendant des années. »
Un chrétien peut-il arborer des emblèmes LGBT par soutien envers des personnes persécutées ?
L’association Christians in Sport s’est posée la question quant à savoir si un chrétien pouvait arborer des emblèmes en soutien à la communauté LGBT. En l’occurrence, il s’agissait à l’époque de la publication de cet article des lacets arc-en-ciel lancés en 2013 par l’organisation Stonewall qui milite pour une reconnaissance des demandes de la communauté LGBT. Mais cette question est toujours aussi actuelle dans le contexte du port de brassards « One Love » au Qatar.
L’auteur rappelle de façon préliminaire que l’utilisation des couleurs arc-en-ciel est soit laissée à la discrétion des joueurs et des clubs, soit imposée par exemple via des numéros dans ces couleurs sur les maillots.
Il constate que divers joueurs de différentes confessions ont refusé de participer à ces campagnes cette année, ainsi Idrissa Gueye, musulman, qui a refusé de participer à la Pride Round de la Ligue 1 en France, ou sept joueurs de l’équipe Manly de la National Rugby League en Australie.
L’article poursuit en soulignant la nécessité d’un traitement équitable et de l’absence de harcèlement :
« Les chrétiens devraient être à l’avant-garde de tout travail visant à affirmer et à défendre le droit à une vie exempte de harcèlement, d’intimidation et de violence ».
Il conteste cependant la vision LGBT qui présente l’identité sexuelle comme l’identité fondamentale.
Selon l’auteur, « il paraît difficile de ne pas être d’accord avec quelqu’un sur ce sujet, car cela revient à dire que vous n’êtes pas d’accord avec son identité. En effet, la pensée occidentale dominante aujourd’hui soutient que notre identité est formée par ce que nous sommes, ce que nous pensons, ce que nous ressentons et ce que nous désirons. L’auteur Carl Trueman affirme que cela est aujourd’hui principalement vu avec nos désirs sexuels ».
Cette nouvelle vision anthropologique conduit, selon lui, à faire que ce symbole d’unité devienne en réalité un symbole d’exclusion, car des joueurs refusant de porter des couleurs LGBT sont sanctionnés. L’article mentionne le Christ qui avait compassion des exclus et souligne également que Christians in Sport s’aligne sur le christianisme historique et orthodoxe selon lequel le dessein de Dieu est dans le mariage hétérosexuel.
L’auteur affirme pour autant qu’être en désaccord avec « Rainbow Laces » ne signifie pas être intolérant :
« Nous pouvons aimer et nous soucier de tous ceux avec qui nous faisons du sport tout en étant en désaccord avec eux sur certaines questions. »
Il achève son article en rappelant que porter ce type de symbole pourrait être perçu comme un soutien à certaines revendications sociétales de cette communauté, tandis que ne pas les porter pourrait être perçu comme de l’indifférence au sort des homosexuels emprisonnés ou tués en tant que tels, soulignant ainsi la complexité de cette décision.
« Porter des lacets arc-en-ciel peut ressembler à un soutien à ce que nous n’approuvons pas, de même que ne pas les porter peut saper ce que nous voulons affirmer en tant que chrétiens. »
Christians in Sport laisse en conclusion la décision à la responsabilité de chacun que l’auteur engage à prier pour trouver la sagesse sur ce sujet.
Jean Sarpédon