Augmentation de la violence à l'égard des minorités religieuses en Inde : l'Alliance évangélique mondiale sonne l'alerte
Un événement organisé par l'Alliance évangélique mondiale en marge du Conseil des droits de l'homme le 19 septembre dernier à l'ONU sur les violences interethniques dans l'Etat du Manipur en Inde fait état d'une situation de crise.
La crise des droits humains et notamment les violences à l'égard des minorités religieuses dans l'Etat du Manipur en Inde, c'était le sujet d'un événement organisé à Genève le 19 septembre dernier par l'Alliance évangélique mondiale (WEA) en partenariat avec une coalition multiconfessionnelle représentant des organisations chrétiennes, musulmanes et hindoues.
Cette conférence organisée en marge de la session du Conseil des droits de l'homme a reçu une grande attention puisqu'en seulement quatre jours le clip de la table ronde a été visionné plus de 20 000 fois.
50 000 déplacés et plus de 200 églises incendiées ou endommagées
Selon Evangelical Focus, l'événement a débuté avec une présentation vidéo de l'avocat Nury Turkel de la Commission sur la liberté religieuse internationale (USCIRF) dans laquelle il décrit l'ampleur de la crise dans cette région de l'Inde. Il évoque 50 000 personnes déplacées, près de 200 morts, de nombreux cas de violences sexuelles contre les femmes et plus de 200 églises et deux synagogues incendiées ou endommagées.
L'avocat américain, défenseur des droits de l'homme, affirme qu'en Inde, les discours de haine sont utilisés pour justifier des atrocités et que le gouvernement choisi de contrôler la parole publique. Récemment quatre journalistes qui ont couvert ces incidents ont notamment été poursuivis par le tribunal.
Florence Lowe, présidente fondatrice de la North American Manipur Tribal Association (NAMTA) qui témoigne de la situation dramatique sur place, fustige un gouvernement qui n'agit pas. Elle affirme que malgré plus de 6 500 plaintes, la police ne prend pas en compte la parole des victimes. .
"Chaque jour, je suis de plus en plus en colère contre l'inaction et l'ineptie totale du gouvernement indien."
Génocide contre les musulmans indiens
Selon Hena Zuberi, directrice du plaidoyer pour la justice pour tous et coprésidente du groupe de travail sur l'Inde à la Table ronde internationale sur la liberté religieuse, des chefs religieux hindous encouragent le génocide contre les musulmans indiens dans la région.
Elle explique que les attaques contre les musulmans indiens suivent toujours le même schéma : les discours de haine créent d'abord un mouvement de foule dans les zones musulmanes. Les maisons sont ensuite attaquées alors que la police reste là sans intervenir et les musulmans sont ensuite blâmés pour la violence.
Les femmes particulièrement visées
Reem Alsalem, rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes et les filles, décrit pour sa part de violentes attaques à l'égard des femmes de tous âges à Manipur, principalement pour des "raisons religieuses et ethniques". Elle ajoute que son bureau a demandé des informations au gouvernement indien sur les réponses des forces de l'ordre et du système judiciaire.
Suite à la publication de la vidéo de cette table ronde, le directeur du bureau de Genève de la WEA, Wissam al-Saliby, qui était le modérateur de l'événement, a été attaqué en ligne. Une version falsifiée du clip a notamment été publiée ainsi que de fausses informations à son propos, indiquant qu'il avait été arrêté en Inde a deux reprises.
Thomas Schirrmacher, secrétaire général de l'Alliance évangélique mondiale, lui a témoigné son "plein soutien".
La persécution des chrétiens en Inde
Si la situation de Manipur est particulièrement critique, on observe une augmentation gloable de la violence à l'égard des chrétiens en Inde. Selon un communiqué publié le 7 septembre par le Forum chrétien uni, depuis le mois de janvier, 525 incidents violents contre des chrétiens ont été resencés dans 23 Etats indiens.
Le rapport indique qu'il existe actuellement 13 régions à travers le pays où il est désormais dangereux de pratiquer le christianisme. Bastar et Kondagaon, dans le Chhattisgarh, où il y a eu respectivement 51 et 14 actes de violence contre des chrétiens, arrivent en tête.
Près de 520 chrétiens ont été détenus dans le pays en vertu de la loi anti-conversion cette année tandis que d'autres se sont vu refuser l'accès à des sources d'eau et parfois, il leur est même interdit de récupérer leur propre récolte.
Le pays est classé 11e dans l'Index Mondial de Persécution des Chrétiens 2023 de l'ONG Portes Ouvertes. L'organisation indique dans son rapport que la persécution a "considérablement augmenté" depuis 2014 et affirme que les chrétiens qui appartiennent souvent aux castes les plus pauvres de la société, "subissent de graves violence" et "sont considérés comme des citoyens de seconde zone".
Camille Westphal Perrier
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