Après son suicide, les parents d’Emilie publient son journal intime pour briser l’omerta du harcèlement scolaire
Emilie, 17 ans, victime de harcèlement scolaire au sein de son établissement a décidé de mettre un terme à ses souffrances en se défenestrant. Après sa mort, ses parents ont découvert son journal intime dans lequel elle raconte jour après jour son calvaire au sein d’une institution qui tarde encore trop souvent à déceler les drames qui se jouent.
En dévoilant le journal d’Emilie et en permettant au journal La voix du Nord de le publier, les parents d’Emilie souhaite dénoncer l’omerta qu’ils ont subie. Ils ont expliqué à La Voix du Nord que la direction refusait de « parler de violences ou de harcèlement. Ce qui les intéresse, c’est de garder leur réputation. »
La jeune fille, douée, en tête de classe, au look moins soigné que d’autres élèves, dont les baskets et le jean n’étaient pas suffisamment tendance, avait choisi de préserver ses parents et de taire son immense souffrance. Elle écrit dans son journal :
« Je ne voulais pas que mes parents sachent à quel point j’étais pitoyable et pensent avoir donné naissance à une pure sous-merde. »
Elle y parvient. Comme souvent les enfants et adolescents victimes de harcèlement, elle parvient à garder son mal-être pour elle et lutte quotidiennement contre les attaques de ses camarades. Elle couche toutefois sur le papier les évènements qui émaillent ses journées. Elle mentionne le quatrième étage comme un refuge, « là où il n’y avait jamais personne aux heures creuses car personne n’avait la foi de monter jusqu’au quatrième ». Pour les moments plus courts, ce sont les toilettes qui constituent l’échappatoire.
« Les toilettes étaient le seul endroit dans ce foutu collège où j’étais sûre d’être tranquille. Ne serait-ce qu’épargner 15 minutes de supplice à ma journée ferait qu’elle serait moins insupportable. »
Demeurait l’épreuve de fendre la foule à travers la cour...
[Mise à jour du 17 mars] L’Etat vient d’être reconnu en partie responsable du suicide d’une autre jeune fille, Marion Fraisse. Marion s’est suicidée le 13 février 2013, elle avait 13 ans.« Je sentais sur moi les regards des autres. Je voyais leurs sourires quand ils me scrutaient, je sentais leurs yeux se poser sur mes vieilles baskets, mon jean effilé, mon pull à col roulé et mon sac à dos. J’entendis quelques ‘clocharde!’ (...) Esquiver les coups, les croche-pieds et les crachats. Fermer ses oreilles aux insultes et moqueries. Surveiller son sac et ses cheveux. Retenir ses larmes. »
L’Education Nationale, les médias, les associations de parents d’élèves souhaitent se mobiliser de plus en plus pour faire connaître le drame du harcèlement.
L’ennemi numéro 1 des familles de victimes ou des équipes éducatives est le silence. Déceler les signes du harcèlement, aider les enfants et les adolescents à sortir du silence, les croire, les déculpabiliser d’être victime et remettre en perspective les faits au regard de la loi, sont les enjeux majeurs de la lutte contre le harcèlement scolaire. Le harcèlement est puni par la loi, la loi doit être appliquée, les enfants et adolescents doivent connaître leurs droits et pouvoir s’y référer en cas de besoin.
Depuis la publication du journal, les langues se délient à nouveau. Sur la page Facebook de « Partage Info Police », on trouve depuis hier le bouleversant témoignage de Jonathan, victime de harcèlement ayant préféré s’immoler par le feu que de continuer à vivre.
Mardi 27 septembre, France 3 a consacré sa soirée au harcèlement scolaire en diffusant une série suivie d’un débat. Le site de l’Education Nationale Non au harcèlement relaie les initiatives.
Nous vous proposons de découvrir l’intégralité de ce poignant journal pour prendre conscience de ce drame et tenter de mieux comprendre l’indicible.