Les autorités indiennes viennent d’ordonner un couvre-feu et de déployer des forces de l’ordre dans la ville d’Imphal, pour tenter de contrôler un conflit qui s’envenime entre deux ethnies dans l’État du Manipur en Inde.
Majoritairement chrétienne, l’ethnie des Kuki bénéficie de mesures de discriminations positives dans l’État du Manipur au nord-est de l’Inde. Mais la communauté majoritaire, les Metei, qui eux sont en majorité hindous, refusent les avantages dont bénéficient les Kuki, dont les postes aux emplois publics ou les places à l’université.
Le 11 novembre, le corps d’une femme de l’ethnie Kuki a été découvert brûlé. En réponse, des miliciens de cette ethnie chrétienne ont attaqué la police. Dix assaillants ont été tués dans cette attaque, et la communauté Kuki leur a rendu hommage ce mardi 19 novembre.
Plus tard, six corps de personnes apparentant à la communauté Metei ont été retrouvés, attisant la colère de cette ethnie hindoue, réclamant des opérations contre les Kuki.
Les autorités sont accusées par plusieurs ONG d’agir en faveur de la communauté hindoue, dans un État où le parti présidentiel, le BJP, à tendance nationaliste hindoue est majoritaire.
Ce conflit n’est pas nouveau. Déjà en mai 2023, plus de 200 morts avaient été à déplorer, lors de précédents affrontements, et des dizaines de milliers de personnes avaient été contraintes à fuir leur maison. Tout est parti d’une décision d’un tribunal local contestant les droits exclusifs des tribus Kuki sur leur territoire.
Cette minorité chrétienne constitue près de 30 % de la population de 3,6 millions d’habitants et n’a que dix élus sur soixante à l’assemblée législative du Manipur. Aucun développement de leurs habitats ou de leur région n’a été mis en place par le gouvernement local aux mains des hindous.
Depuis plus d’un an, les violences se poursuivent dans un État qui ne semble plus maître de la situation et qui est obligé d’établir un couvre-feu. Même au sein des familles, les divergences apparaissent.
L’ONG Portes Ouvertes rapporte que Zozam, une Kuki mariée depuis trente ans à un Meitei, vit séparé de son mari depuis plus d’un an, en raison des risques pour leur sécurité. "Nous pensions que seule la mort pourrait nous séparer, témoigne Zozam. Nous n’aurions jamais pu imaginer une telle violence !", explique-t-elle.
Jean-Benoît Harel