Affaire d’État : infiltration d’Églises par le FBI et plainte contre le ministère de la Justice américain
Une association de défense catholique et une organisation juridique de surveillance des activités gouvernementales ont déposé plainte fin avril contre le ministère de la Justice américain après que le FBI eut mis des catholiques sur une liste de surveillance. Cette plainte intervient alors que le gouvernement Biden est accusé d’attenter à la liberté religieuse des chrétiens.
Le 8 février dernier, un agent du FBI suspendu avait révélé que le bureau de terrain du FBI à Richmond en Virginie avait inscrit des catholiques sur une liste de surveillance. L’agence avait lancé le 23 janvier précédent une enquête sur les « catholiques traditionalistes radicaux » qu’elle présentait comme une menace extrémiste.
Selon l’agence, des catholiques partisans de la messe en latin et partisans d’une théologie conservatrice constituent une menace extrémiste en raison de supposés liens avec les mouvements suprématistes blancs. La note du FBI les appelle « catholiques radicaux-traditionalistes » pour les distinguer des « catholiques traditionalistes » qui « préfèrent la messe latine traditionnelle et les enseignements et traditions pré-Vatican II, mais sans les croyances idéologiques plus extrémistes et la rhétorique violente ».
Pour confectionner son mémorandum, le bureau de Richmond avait notamment repris une fiche d’une association d’extrême gauche, le Southern Poverty Law Center, qui a même été critiqué par le Washington Post en 2018 notamment parce qu’il met sur le même plan les conservateurs et les néo-nazis. Le document a été critiqué par 20 procureurs généraux, et le FBI a officiellement retiré le document en affirmant qu’il ne correspondait pas à ses méthodes de travail.
Plainte pour refus du FBI de communiquer les documents litigieux
L’association CatholicVote et l'organisation juridique Judicial Watch ont envoyé le 8 mars des demandes au FBI pour accéder aux documents concernant divers mouvements et associations catholiques. La loi d’accès à l’information de 1966 oblige en effet les agences fédérales à laisser les demandeurs consulter les documents qui les concernent. Le 14 mars, le FBI a informé les requérants qu’il ne pouvait leur répondre dans le délai légal de 20 jours en raison « circonstances inhabituelles ». La lettre de l’agence évitait cependant de préciser laquelle des quatres demandes des requérants était concernée.
Après une demande d’éclaircissement de CatholicVote et Judicial Watch en date du 4 avril, le FBI a répondu le 6 que trois des demandes avaient été combinées, sans préciser lesquelles ni ce qu’il en était de la quatrième. Les organisations ont demandé le même jour des précisions auxquelles l’agence n’a jamais répondu. Elle n’a non plus pas dit si elle entendait se conformer à la loi.
Après avoir vainement attendu pendant plus d’un mois et demi, les demandeurs ont déposé plainte contre l’agence fédérale et le département de la Justice dont elle dépend. Dans leur mémoire, ils déclarent qu’ils ont épuisé toutes les options pour obtenir les informations demandées et que depuis le 6 avril le ministère et l’agence de surveillance ignorent leurs requêtes.
Le président de CatholicVote, Brian Burch a dénoncé une chasse aux sorcières qui ne dit pas son nom :
« Nos agences gouvernementales armées et corrompues ont affiché un modèle de mépris pour la justice et l’État de droit en donnant la priorité à la partisanerie dans son idéologie et ses programmes plutôt qu’à la protection des Américains – en particulier ceux avec lesquels ils sont en désaccord politique. Nous exigeons de la transparence de la part de notre gouvernement et sommes déterminés à découvrir jusqu’où va le fanatisme anticatholique. »
Le ministre de la Justice sur la sellette au Congrès
Après la lettre des procureurs généraux de 20 États au ministre fédéral de la Justice Merrick demandant au gouvernement de publier tous les documents utilisés dans la confection de son mémo. Le Comité judiciaire de la Chambre des représentants a convoqué le directeur du FBI, Christopher Wray, et son président, le républicain Jim Jordan a déclaré que le FBI avait infiltré au moins un agent parmi les catholiques traditionalistes pour obtenir des informations. Jordan a ajouté que l’agence a proposé de recruter des informateurs au sein du clergé.
Lors de son audition, Wray a déclaré que le FBI avait immédiatement supprimé le mémorandum des systèmes du FBI et ajouté que l’agence n’opérait pas ainsi d’habitude :
« Cela ne reflète pas les normes du FBI. Nous ne menons pas d'enquêtes basées sur l'appartenance ou les pratiques religieuses, point final. »
Convoqué devant le Comité judiciaire du Sénat, le ministre de la Justice a prétendu que ses services ne recrutaient pas des sources dans les Églises. Le sénateur républicain Josh Hawley a envoyé, le 11 avril, une lettre au ministre l’accusant d’avoir menti devant et exigé de savoir combien il y avait d’informateurs infiltrés ou d’autres agents dans les communautés religieuses.
Hawley a rappelé dans sa lettre que le ministre avait prétendu n’avoir aucun biais anticatholique, qu’il n’y avait pas de surveillance religieuse et que le FBI n’avait pas d’informateurs dans les églises à travers le pays. Le sénateur a souligné que l’enquête du Comité judiciaire de la Chambre des représentants avait démontré que « tout ceci était faux ».
Merrick Garland told me - under oath - the FBI was not targeting Catholic parishes. That appears to have been a lie. I want the truth 👇 pic.twitter.com/HE8ncapeYz
— Josh Hawley (@HawleyMO) April 11, 2023
« Cela montre que le ministère « cultive clairement des sources et des espions » dans les paroisses catholiques, en dépit de ce que vous avez affirmé devant le Comité judiciaire du Sénat », a déclaré Hawley.
L’administration Biden accusée d’un parti pris antichrétien
Invité dans l’émission radiodiffusé The Sean Hannity Show, Hawley a déclaré qu’il y a, sous l’administration Biden, « un système judiciaire à deux vitesses » et a pris en exemple une intervention des fédéraux chez une famille catholique opposée à l’avortement.
Le sénateur Hawley faisait là référence à l’intervention de 25 agents du FBI chez Marc Houck, en septembre dernier. Ce dernier avait bousculé et fait tomber un septuagénaire bénévole d’une d’avortement clinique qui criait sur son fils. Le gouvernement fédéral avait ainsi transformé un cas local en affaire fédérale. Le comité judiciaire du Sénat avait convoqué le ministre de la Justice et exigé des explications sur cette intervention.
Le spectacle de l’intervention contraste avec la bienveillance du ministère de la Justice qui a recommandé, en avril dernier, qu’un transgenre activiste pro-avortement qui avait écrit « F.ck Catholics » sur les murs d’une église ne soit pas condamné à une peine de prison. Le prévenu avait abîmé des statues, jeté des pierres sur le bâtiment et agressé avec une bombe à peinture un employé de la paroisse pour protester contre l’arrêt de la Cour suprême de juin 2022 disant que l’avortement n’est pas un droit fédéral.
Récemment, l’administration Biden a voulu fermer un hôpital public catholique dans l’Oklahoma parce qu’il refusait d’éteindre la flamme d’une bougie dans sa chapelle. Le gouvernement a fini par reculer face au ridicule de la situation.
Jean Sarpédon