A 150 ans, l'hebdo catholique "Le Pèlerin" a foi en son avenir

A 150 ans, l'hebdo catholique Le Pèlerin a foi en son avenir

Plus ancien hebdomadaire de France, "Le Pèlerin" souffle sa 150e bougie, confiant dans son rôle de "journal du lien" malgré l'effondrement de la pratique catholique et de la presse papier, avec l'ambition de sauver les clochers de l'Hexagone.

Anniversaire oblige, le titre fondateur du groupe Bayard (La Croix, Notre Temps, etc.) publie jeudi un hors-série plongeant dans ses archives "depuis le premier numéro du 12 juillet 1873", dont "la première étincelle n'était pas journalistique", rappelle son directeur de la rédaction, Samuel Lieven, à l'AFP.

Créé par les Augustins de l'Assomption, congrégation catholique toujours propriétaire de Bayard, Le Pèlerin est conçu à l'origine comme un bulletin "pratique" pour accompagner l'essor des pèlerinages vers Lourdes et La Salette, favorisés entre autres "par l'explosion du chemin de fer".

C'est en 1877 qu'il est refondé "sur la base d'un hebdomadaire, d'une revue qui va s'étoffer, se diversifier", jusqu'à "devenir le gros magazine d'actualité familiale catholique", une sorte de "Paris Match catho de la France rurale qui va culminer à 650.000 exemplaires dans les années 1960-1970".

Avec près de 100.000 abonnés (-9% entre 2021 et 2022, selon l'Alliance pour les chiffres de la presse et des médias), le titre, qui emploie une quarantaine de journalistes, continue de revendiquer son identité chrétienne sans "mettre des curés à toutes les pages" ni s'inscrire dans un "catholicisme politique et identitaire".

Loin de l'esprit de "reconquête" de ses débuts anti-république, anti-maçonnerie et antisémites, Le Pèlerin "a évolué avec son histoire", fait valoir M. Lieven.

Il a notamment favorisé "la diffusion du concile Vatican II (1962-1965)", qui a ouvert l'église au monde moderne et à la diversité.

Des thèmes comme l'environnement, le patrimoine et les solidarités y côtoient les pages télé et les "rubriques proprement spirituelles" en fin de journal.

Sur les questions toujours sensibles pour la communauté catholique, comme l'avortement, "on n'est pas dans la condamnation a priori de choix qui concernent avant tout l'intimité des gens (...) Les lecteurs veulent qu'on éclaire ces choix et, après, chacun est renvoyé à sa liberté en sa conscience". Ils ont en outre "énormément évolué" sur les questions liées au mariage pour tous qui, "il y a dix ans, ne représentait pas une évolution naturelle pour une grande partie" d'entre eux, selon M. Lieven.

"Appétit de sens"

En témoigne ce récent récit sur un "couple d'homosexuels engagés dans l'Eglise qui a réussi in extremis à avoir une bénédiction de leur union par un prêtre", article qui "n'a pas entraîné de levée de boucliers".

Premier titre de la presse chrétienne devant le quotidien "La Croix" (83.000 exemplaires par jour en 2022) et l'hebdomadaire du groupe Le Monde "La Vie" (62.000 par semaine), "plus à gauche et citadin", Le Pèlerin doit sa longévité à un "lectorat extrêmement fidèle (d'une moyenne d'âge de 70 ans) qui ne se désabonne quasiment plus après trois - quatre ans".

Et "ce n'est pas parce que les gens ne vont plus à la messe qu'il n'y a plus d'appétit de sens, de spiritualité", estime Samuel Lieven. Courrier des lecteurs, réunions en visioconférence, newsletters... le journal mise donc sur "le lien avec les lecteurs, son ADN profond".

Son site internet, qui fera payer ses contenus à la rentrée pour favoriser le recrutement d'abonnés, va rester sur sa "dynamique essentiellement communautaire autour de la marche et du patrimoine".

Le Pèlerin publiera en outre jeudi un baromètre visant à "mesurer l'attachement des Français à leur patrimoine local", point d'orgue du concours "J'aime mon clocher".

À cette opération parrainée par Stéphane Bern s'ajoute une "action de lobbying", passée début juin par le Sénat, destinée à promouvoir le partage de l'usage des églises, "entretenues à grand frais pour être le plus souvent fermées", afin qu'elles redeviennent des "lieux de vie".

"Cela existe déjà dans plusieurs endroits, où on y trouve des activités associatives, un accueil de pèlerins ou de migrants, des salles de révision ou une école de carillonneur", explique M. Lieven.

"Une sorte de renvoi d'ascenseur" de la part du Pèlerin, qui s'est "beaucoup développé en proposant des abonnements à la sortie des églises".

La Rédaction (avec AFP)

Crédit image : Creative Commons/ Creazilla

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